Je m'étais promis, il y a quelques mois, que si jamais je devais collaborer à un webzine/magazine, ma première parution serait méchante, cinglante, lâche, relevant plus de la violence littéraire gratuite que d'un avis personnel. Le type d'action qui montrerait à tous que je suis un dur et que ce n'est pas avec de gentils emails et de jolis packs promos qu'on m'amadouerait (sans Mariam). Que j'imaginerai avec un sourire narquois les musiciens épinglés de copie carbone d'un groupe de deathcore chercher dans ma fiche perso une raison de se dire que je suis un chroniqueur aigri, fan de métal symphonique pagan et qui, à ses heures perdues, s'adonne au cosplay.
Comme toute promesse faite le 1er janvier ou bourré (le combo "bourré au réveillon" comptant double), je ne la tiendrai pas. Voici donc Hospital corners de Bastions sur ma platine vinyle, premier album long-format d'un jeune groupe anglais sorti sur le petit - mais déjà bien implanté - label anglais In At the Deep End (chez qui sont notamment sortis les disques de "jeunesse" d'Architects, Gallows ou Sylosis). Je reprends donc les Gallois après un premier EP très prometteur (Island Living sorti sur un autre très bon label anglais Tangled Talk Records - Kerouac, Listener, The Long Haul, The Prestige) dans un style que je qualifierais de hardcore alternatif entendez par là "pas de twostep et de gang vocals mais une voix très émotive et un background rock".
Ouverture sur "Augury", dont le mauvais clip sorti il y a peu, ne fait pas honneur à la puissance de cette chanson : un guitare/voix puissant et un crescendo jusqu'au final midtempo des familles. Première claque. Passons à "Visitant", premier single sorti en clip, un morceau plus rapide qui met en avant le choix de production: un son naturel, sans effets superflus et notamment une guitare Jazzmaster peu saturée "recordedwithout using humbuckers" qu'ils écrivent. Aucun doute là dessus. La fin ambiante de ce "Visitant" amène "In the Shadow of a Mountain", un morceau aux couplets plus épurés, voire plus classiques, d'un hardcore émotif. Puis vient "The Lengths", pour moi la vraie claque de l'album. Si la recette reste la même (un couplet punk rapide, un break introduisant une fin plus mélodique), elle touche ma corde sensible emphasée avec l'apparition en bonus de Frank Carter (ex-Gallows crédible, actuel crooner 2.0 de Pure Love donc moins crédible).
Arrive ensuite la piste 'Warmth of the World' au tempo plus rapide et presque épileptique. Si l'album était alors très midtempo, Bastions montre ici sa capacité à accélérer le pas et se rapproche d'un chaos bordélique à la The Chariot ou de nos français de The Prestige. Un peu d'air frais et de violence gratuite bienvenue que je comparerais à ma bière fraiche d'hier après-midi alors que le thermomètre affichait les 30°C.
Si "Child of Glass", sixième piste de cet album, n'apporte pas de grande évolution à la tournure de l'ensemble (si ce n'est la deuxième guitare un peu western, rappelant quelques morceaux du Version de Poison the Well), "Grief beggar" et son intro très rock indie (pensez à Young Widows) relance la machine. "I tried to stitch the sea to the shore", interlude guitariste assez intéressant me laisse espérer un changement total d'ambiance pour les deux dernières pistes mais 'Onset' et 'Dark Father' me confirment qu'on repart pour une séaunce de hardcore burné et violent. Pour la pause, c'est comme sur l'autoroute : c'était à l'aire précédente. Alors encore deux morceaux très HxC, oui, mais ils sont biens et il faut noter la fin magnifique de "Dark father" : sauter d'un gang vocal violent à un passage épuré et puissant orchestré d'une simple guitare, un beat binaire et une voix sur le fil, voici la démonstration de la classe galloise.
Ok donc, j'ai pris une claque, peut-être pas aussi grosse qu'espérée mais une bonne claque dans la gueule, du type que ne renierait pas Joey Starr sur une hôtesse de l'air en plein vol. Bastions sait où il va en nous offrant un son souvent violent et parfois mélodique mais aussi d'où il vient en conservant son caractère très classique hardcore. Si l'album manque parfois un peu de renouvellement dans ses structures ou ambiances et aurait peut-être besoin d'une plus grosse prise de risque pour vraiment atteindre le top 3, on reste quand même sur un coup de coeur. Pour moi l'une des grosses sensations hardcore de l'année dernière. Rien que ça ouais.