Acid Mothers Temple - Electric heavyland Pour se retrouver en couv' du magazine UK Wire avec le statut déjà bien établi de culte naissant et qu'on fait du space rock vs metal psyché, le tout sans être anglais, faut quand même avoir, a priori, un truc de plus que les autres. Et en même temps, quand on pioche au hasard un disque dans la foisonnante (on y revient plus tard) discographie d'Acid Mothers Temple, tiens Electric heavyland par exemple, on se rend que ce n'est là que l'un des innombrables OMNIs (objets musicaux non identifiables) que nous a pondu une bande de hippies barbus nippons très largement influencés par la mouvance psychédélique des 60's et le krautrock allemand. Ou autant dire que ça ne s'écoute pas sans se préparer au préalable à une expérience sensorielle cosmique et psychotrope.

Un mélange de Merzbow, de Master Musicians of Bukkake et de Fantômas défoncé, le tout plongé dans une marmitte bouillonnante de substances toutes plus bizarroïdes les unes que les autres, un bain de produits hallucinogènes duquel on ne ressort pas complètement idemne, AMT livre avec cet Electric heavyland, un disque scindé en trois parties, un "truc" complètement hors du commun, habité par les dieux du rock psychédélique (et deux trois chamans bien barrés aussi au passage). Une masse sonore extrêmement dense, assourdissante et chaotique en même temps que joyeusement bordélique et inventive, parfois trop, que l'on ne sait pas toujours comment appréhender, mais qui ne peut décemment laisser indifférent. Ecouter Acid Mothers Temple, c'est un peu comme se farcir trois groupes à la fois mais sur un seul disque : ça fourmille de tout un tas de choses, impossible de suivre une ligne directrice précise... définitivement en marge.

Parce qu'il faut être honnête, Acid Mothers Temple, ça ne s'écoute donc qu'en ayant l'esprit bien ouvert, les tympans aux aguêts, prêt se laisser emporter par le typhon expérimental et bruitiste proposé par les japonais. Parfois à la limite de l'overdose, d'autres fois bluffant de maîtrise et d'inventivité, Electric heavyland, est une oeuvre à la richesse incroyable... et pourtant une goutte d'eau dans la discographie de ce groupe définitivement pas comme les autres. Une entité mouvante qui doit compter une bonne cinquantaine d'enregistrement au compteur... en seulement seize années de carrière. Pas de quoi concurrencer Merzbow en termes de productivité (ce-dernier étant de toutes les façons indépassable), mais largement assez pour s'imposer comme une figure marquante de la musique actuelle. Même si le statut de culte est peut-être un peu exagéré...