Comme pas mal de gens, j'ai découvert ce groupe suisse cette année, car ils ont eu pas mal d'exposition dans la presse rock / métal, ainsi que des concerts en support de gros groupe (Meshuggah notamment). Le peu que j'en avais entendu m'a instantanément plu. Ou plutôt devrais-je dire instantanément mis une grosse baffe. Ça faisait très longtemps que je ne m'étais pas pris une telle claque musicale, et me suis retrouvé comme un ado qui découvre un nouveau groupe qui le surprend d'entrée comme Pantera et System Of A Down l'ont fait dans les années nonantes (en suisse dans le texte).
Zeal & Ardor, est le troisième album (éponyme donc) des Helvètes. Enfin je dis groupe, mais il faut rappeler que Zeal & Ardor a tout d'abord commencé comme un projet solo pour Manuel Gagneux, le chanteur / guitariste qui a par la suite été rejoint par le duo Denis Wagner / Marc Obrist aux chœurs, Tiziano Volante à la guitare, Mia Rafaela Dieu à la basse, et enfin Marco Von Allmen à la batterie. Le projet a commencé à New York, mais est maintenant basé à Bâle en Suisse. Décrire le son du groupe n'est pas une simple affaire. Le genre est d'ailleurs décrit comme Avant-garde métal, black métal et néo-soul sur leur page Wikipédia, ce qui n'aide pas vraiment à se faire une idée sur ce quoi s'attendre. Le disque ouvre avec des claviers et sons électro menaçants, mais avec un beat lent. Les voix chantées douces rajoutent à l'ambiance dérangeante. Impossible de prédire comment la galette va se développer à partir de ce premier morceau. Le groupe mélange des genres bien opposés sur le spectre musical tout au long de l'album : on passe à des sons électros zens à du gros métal, le tout avec des voix tantôt douces et bluesy parfois mêmes murmurées et tantôt criées comme si Gagneux était possédé par un démon pas très content.
On ne sait jamais ce qui arrive au tournant. Et ça c'est ce qui m'a fait accrocher direct au disque. Ensuite le deuxième élément que j'ai trouvé "nouveau" à ce projet est l'approche des voix, avec des chœurs qui rappellent parfois les chants des esclaves noirs dans les champs de cotons, en répétant les lignes bluesy de Gagneux, ou en criant à l'unisson avec ce dernier. Le tout donne un rendu vraiment original et jamais entendu dans le métal. La voix de Manuel a une très belle texture limite rauque, et son chant crié est très impressionnant également. Il oscille sans effort entre les deux, ce qui rajoute à l'effet "inattendu" du disque. Niveau musique, on passe des guitares clean à de grosses guitares bien lourdes, le tout avec des nappes de clavier qui rajoutent à la tension générale de l'album. La batterie est super précise et passe sans broncher des rythmes groovy au black métal avec sa double pédale enragée. Bref, ça joue. Le single "Death to the holy" reflète assez bien ce que fait le groupe musicalement. C'est d'ailleurs le premier titre que j'ai entendu, et qui m'a fait accrocher. La production de ce disque est excellente, chaque écoute nous fait découvrir des nappes cachées de cette musique.
Je ne peux que recommander cet album, ça ne plaira pas forcément à tout le monde, surtout si vous n'aimez pas le mélange des genres, mais le tout est très bien fait et garde l'écoute de l'album de bout en bout intéressante et fraîche.
Publié dans le Mag #51