The Young Gods Deluxe En 1987, deux ans après leur formation, The Young Gods sort son premier album éponyme et pose les bases de ce que deviendra l'indus. C'était il y a déjà 25 ans et pour fêter ça, le groupe nous propose une réédition retravaillée de son opus agrémenté d'un live enregistré au Fri-Son la même année. Pour celui qui découvrirait le talent des Jeunes Dieux aujourd'hui, il faut s'accrocher avant l'écoute des albums (le studio et sa quasi version live car les titres joués sur scène sont ceux de l'album à l'exception de "Sing sing" la reprise de Nougaro), la musique des Suisses étant encore très expérimentale et se refusant à entrer dans les codes du musicalement correct ("Fais la mouette" c'est peut-être moins con que "Fais la poule" cela mais réclame tout de même une sacrée ouverture d'esprit).

Pour comprendre l'importance de cet album et son impact, il faut le replacer dans son contexte : en 1987, Ministry n'a pas encore écrit The land of rape and honey (et forcément encore moins The mind is a terrible thing to taste) qui marqueront durablement eux aussi la musique industrielle, en 1987, Trent Reznor participe discrètement aux combos Exotic Brids ou Slam Bamboo (et à part les die hard fans de NIN, personne ne connaît ces groupes). The Young Gods va donc puiser ses références chez les Swans, Einstürzende Neubauten, Skinny Puppy, Merzbow ou Death in June et se développe en même temps que Laibach ou Front Line Assembly. Et si aujourd'hui le groupe est mondialement reconnu pour sa finesse et le traitement particulier de ses sons, ses membres sont partis de compositions très brutes et le travail du vénérable Howie Weinberg (Faith No More, Garbage, Pantera, Helmet, Red Hot Chili Peppers, Dream Theater, Smashing Pumpkins, Skunk Anansie, Rammstein, ...) qui a remasterisé l'album n'a pas altéré cette touche assez emblématique de la fin des années 80.

Pour se lancer dans le monde de la musique, The Young Gods n'avait pas choisi la facilité. Ils ne la choisiront d'ailleurs jamais, la preuve avec l'inaugural "Nous de la lune" et son rythme d'estropié, ses cloches inquiétantes et ce train qui fait résonner les rails. Entre tripatouillages ("Soul idiot"), rock ("Feu") et métal ("Envoyé"), les Suisses touchent à tout et s'imposent comme une nouvelle référence que bon nombre d'artistes citeront et citent encore. Pour la version live, Franz et ses comparses savaient déjà étirer les titres, tendre les atmosphères et transfigurer leurs titres comme ceux des autres (la reprise de Claude Nougaro mais aussi celle de "Hello, hello, I'm back again" de Gary Glitter déjà retravaillée en studio sous le nom de "Did you miss me"). En 1987, The Young Gods ne s'étaient pas trompés au moment de choisir leur patronyme. Et s'ils sont aujourd'hui un peu plus vieux, ils restent des Dieux.