young gods - data mirage tangram Rares sont les groupes à faire des albums toujours différents malgré un style reconnaissable en une fraction de seconde, The Young Gods est de ceux-là. Et si neuf années nous séparent de Everybody knows, on a l'impression que ce son et ces ambiances ne nous ont jamais quittés, comme si les Suisses étaient perpétuellement présents dans nos esprits même si on ne les écoute pas quotidiennement. Excellent par moments, ce nouvel album qu'est Data mirage tangram a également amené quelques déceptions. Pas sur l'artwork et le titre, très fidèles à l'image des Jeunes Dieux puisque la cover est aussi colorée qu'éclatée et puisque le titre peut servir de mots-clés pour définir leur musique : "data" pour les données et le côté ultra numérique de leur travail, "mirage" pour les illusions qu'ils sont capables de créer et "tangram" pour cette facilité avec laquelle ils agencent des pièces identiques de multiples manières pour créer quelque chose de toujours différent.

Si je suis un tout petit peu déçu par cet opus, c'est que deux morceaux sont à la fois très lents et très électroniques, le quasi instrumental final "Everythem" et le torturé et allongé "All my skin standing". "Everythem" clôt l'album, c'est un retour à la vie normale, une porte de sortie comme "Entre en matière" permet de s'introduire dans le monde de Data mirage tangram, à cette différence près que le titre inaugural va quelque part, une mélodie nous prend par la main et nous guide jusqu'à quelques mots doux qui captent notre attention, là où la dernière piste cherche plutôt à nous perdre faute de repères. Quant à "All my skin standing", je lui reproche un aspect "non terminé", le jeu sur les percussions, les textes, la gratte qui déchire le truc, jusqu'à mi-parcours, c'est le kiffe mais ensuite la guitare s'égare dans un solo distordu durant trop longtemps. Alors que "Moon above", construit sur la même base mais avec un saxo sur la fin, réussit à éviter cette sensation en s'achevant avant l'ennui.

En revanche, "Tear up the red sky" peut devenir un marqueur important pour The Young Gods, rythme enlevé, sons lumineux, chant en anglais très mélodieux, basse envoûtante, le titre est excellent de bout en bout. On est loin de l'univers métal-indus du "TV sky" qui était trop bleu avec ce ciel rouge qu'il faut déchirer mais les chaudes saturations apportent un beau contrepoids aux bidouillages froids. L'ambiance du morceau m'a donné envie de réécouter "Cancer" qui est mon titre préféré de Filter (et pendant qu'on y est tout l'album Title of record), le mélange d'organique et de mécanique, de douceur et de rugosité étant juste parfait. "Figure sans nom" se défend pas mal lui aussi bien que les guitares ne s'énervent pas, là, c'est le tempo qui procure le plaisir. Beaucoup plus électro, "You gave me a name" propose un voyage qui fait monter l'excitation progressivement. Tout l'inverse de "Moon above" qui semble ne pas pouvoir tenir la mesure et tituber alors que tout y est maîtrisé.

Comme d'habitude The Young Gods a pris son temps, comme d'habitude, ils ont fait les choses sérieusement (au mixage, tu trouves le boss Alan Moulder pour lequel je réduis les travaux à 10 noms pour ne pas être trop long : Foals, Depeche Mode, U2, Placebo, Nine Inch Nails, A Perfect Circle, The Smashing Pumpkins, Death Cab for Cutie, Puscifer, Foo Fighters...) et comme d'habitude, ils ne laissent pas indifférents. Si tu apprécies, tu écouteras forcément, si tu hésites, écoute au moins "Tear up the red sky".