Talvihorros - Eaten alive Un an et demi après le stupéfiant And it was so, Talvihorros présente sa deuxième lecture du Big Bang sonore avec un Eaten alive qui porte à merveille son titre. Métaphoriquement parlant, car délivrant ici huit pièces d'une densité folle que l'on ne retrouve pas si souvent parmi les compositeurs/musiciens actuels... ceux-là même qui succombent invariablement souvent aux sirènes du mainstream. Sauf du côté de la galaxie Denovali, ce label que l'on ne présente plus et qui fait office de défricheurs de nouveaux horizons musicaux depuis maintenant une petite dizaine d'années, pour, sortie après sortie, bâtir une discographie d'une richesse étourdissante.

Un palmarès rare à l'heure de l'uniformisation généralisé, de la recherche d'une certaine facilité ou de l'innovation outrancière vide de sens (à savoir : chercher à être original sans pour autant en avoir les capacités/idées/maîtrise) et un roster que Talvihorros sublime avec ses créations qui servent sa propre vision du monde musical : unique, tourmenté, sans concession... Mais d'une beauté aussi subtile qu'éclatante ("Little pieces of discarded life", "Four walls"). Etrange aussi, à l'image de ses bricolages sonores que l'Anglais parsème en solo tout au long d'un album naviguant à vue entre ambient, trip-hop, electronica et drone pour assembler divers éléments épars dans des constructions sonores dont lui seul à le secret. Lui c'est toujours Ben Chatwin qui, dans le "confort" de son studio londonien, créé, fabrique, déconstruit, recompose, cisèle à l'envie et en solitaire des morceaux qui forment un ensemble, un tout à l'unicité parfois elliptique, d'autre fois plus évidente. Mais toujours d'une intelligence créative rare ("In the belly of the beast", "Objectum").

Le jeu des contrastes entre basses lourdes et textures scintillant légèrement dans la stratosphère, la poésie lunaire qui habite les passages les plus intimistes de sa musique, Talvihorros conceptualise son œuvre avant de l'interpréter. Et son exécution formelle se révèle être d'une précision diabolique ("Dyspnea" ou "Becoming mechanical") si bien que lorsque l'on est aux prises avec un titre un peu en deçà du reste d'Eaten alive ("The secrets of the sky"), on reste un peu sur notre faim. Un appétit féroce pour l'exploration sonore que Ben Chatwin nourri du reste en jouant avec le minimalisme de "Today I am reborn" pour mieux en pervertir les effets. Et les sublimer de la même manière, toute en intensité, jeu d'ombres et autres faux-semblants habilement mis en travers de la route de son auditoire. Pour mieux le ramener vers l'essence de ce projet qu'est Talvihorros, lequel ne saurait être autrement que multi-facette, polymorphique et de fait irrémédiablement fascinant.