Après la sortie en 2021 du remix de l'album The passion of, paru six mois avant, Special Interest ne perd pas de temps en livrant son troisième LP, Endure, en novembre 2022 via Rough Trade. Le groupe connoté "dance-punk", originaire de la Nouvelle-Orléans en Louisiane, impose son style avec classe. Mené par le chant imposant et le charisme d'Alli Logout, sa musique est caractéristique de la contre-culture car, non-conformiste, elle marie des genres aussi divers que le disco, la pop, l'électro, le glam ou le punk, mais surtout elle se penche, à travers ses textes, sur des sujets contestataires et sensibles comme le sexe et la drogue, bien évidemment, mais également la police, la classe bourgeoise, le statut des afro-américains aux USA, la capitalisme, la gentrification ou même la révolution. Rien que ça. Ça donne déjà un bel indice sur l'état d'esprit qui hante un disque de Special Interest.
Ce nouvel album paraît pourtant joyeux de prime abord, surement dû à son côté dansant qui est présent quasi tout au long de son parcours, avec toutefois pas mal de nuances. Car si la chanson introductive "Cherry blue intention" et celle qui suit, "(Herman's) house", nous ramènent sur un dancefloor dans les années 90, ou bien que "Impulse control" s'impose spontanément par ses velléités électro-punk, quand "Midnight legend" sert de contre-pied à l'ensemble de par son côté "soul dance", les Américains se montrent beaucoup plus sombres avec des titres davantage indus et déshumanisés tels que "My displeasure" ou "Concerning peace". Une ambivalence emplie de sensibilité et de rage qui donne des morceaux franchement super intéressants voire étonnants, comme ce dénouement au déroulement progressif de huit minutes nommé "LA blues", laissant Alli déversé son fiel et son inquiétude sur ce monde en compagnie d'une guitare tout autant démonstrative. En somme, Special Interest est un peu le Rage Against The Machine ou le System Of A Down du disco-punk.
Publié dans le Mag #55