Scorpion Violente - The Rapist Dans l'univers architectural et de l'art, la maxime "Less is more" popularisée par Ludwig Mes Van der Rohe a maintes fois été adoptée pour vanter la puissance du minimalisme, et laisser une place plus importante au vide. Même si Scorpion Violente, duo de synthwave messin formé par Nafi (Noir Boy Georges, The Dreams), et Toma (Organ Punishment, Plastic Wound Infection), couvre ses pistes de sons hypnotiques et bourdonnant sans laisser de place aux pauses et au silence, il n'empêche que leur musique ne bénéficie guère de moyens (des synthés/claviers, une boite à rythme, des effets et quelques amplis). Juste de l'envie, une envie crasse de provoquer l'auditeur jusqu'à la gêne, si ce n'est pas le malaise.

Il se trouve qu'en février dernier, Scorpion Violente a refait l'actu grâce au label Replica Nova et le disquaire indépendant La Face Cachée qui réédite - pour son dixième anniversaire - son deuxième album, The rapist, initialement sorti via le label franco-belge Teenage Menopause Records (Jessica93, Le Prince Harry, Heimat, JC Satàn) connu pour flairer des artistes sortant des sentiers battus et ayant une liberté artistique totale. Une réédition qui fait suite deux ans après à celle d'Überschleiss et une occasion supplémentaire pour déterrer le patrimoine musical "schlague" mais ô combien important des membres du collectif de la Grande Triple Alliance Internationale de l'Est (dont font, entre autres, partie Marietta, Le Chemin de la Honte et Delacave).

The rapist combine à peu près tout ce que haïssent les théoriciens, académiciens, et autres perfectionnistes de l'art musical et de la chanson. Ce qui pourrait être taxé de low-cost concernant ce disque se révèle être en réalité tout bonnement excitant justement. En premier lieu, parce que Scorpion Violente propose un tissu sonore couvert de bariolages intéressants se baladant sur des rythmiques immuables pour un résultat à la fois lancinant et hypnotique. Leur son agrippe et on oublie très rapidement les petites difformités : "Au début elle est froide, mais après, elle est bonne" est probablement la réplique de cinéma culte qui sied le mieux à l'art de Nafi et Thomas. En dernier lieu, parce que leur style est bancal, toujours sur la corde raide, mais d'une vraie sincérité (le groupe en live est excellent et l'atteste) tout en s'inspirant de courants divers finalement peu rebattus (synth-punk, no-wave, électronique, musique industriels, musique de films d'horreur voire SF, etc). Quand il survient, le chant baragouiné et imprévisible nous rappelle Suicide. Pour ceux qui ont pris un plaisir fou à découvrir le laboratoire artistique de Rev et Vega (mais pas que, on peut citer au pif Staccato Du Mal), nul doute qu'ils auront aussi un malin plaisir à rentrer dans celui de The rapist et plus généralement de Scorpion Violente, dont le parcours est un sans-faute... enfin, presque.