Piano Interrupted

Piano Interrupted / Chronique LP > The unified field

Piano Interrputed - The unified field Seulement dix mois après un premier album studio sorti au départ de manière confidentielle, en autoproduction, puis plus largement par le biais du prolifique Denovali Records (que l'on ne présente plus en ces pages avec son roster allant de Blueneck à Thisquietarmy en passant par Celeste, Field Rotation ou Omega Massif et Les Fragments de la Nuit), le duo anglo-saxon Piano Interrupted remet le couvert avec un deuxième opus fatalement attendu par ceux qui avaient découvert son prédécesseur, toujours avec l'appui de la petite maison de disques allemande qui a définitivement tout d'une (très) grande. En termes d'exigence et de qualité, tout du moins.

Ce qui légitime de fait la présence des Anglais sur le label, le duo ayant déjà fait étalage de toute sa classe sur Two by four, il confirme avec The unified field, un disque d'une élégance inouïe pour ceux qui découvriront le projet avec cet opus comme ceux qui le connaissaient déjà par coeur. Une classe folle qui transparaît dès le morceau d'ouverture : "Emoticon", lequel distille une émotion pure qui vient effleurer l'âme de l'auditeur alors que celui-ci se laisse emporter par des arrangements à cordes enveloppant le clavier de leur souffle, lui donnant ainsi toute sa profondeur de champ. Un piano que l'on retrouve sur "Two or three things", pour lequel il porte la mélodie avant que quelques friandises trip-hop/électroniques ne viennent donner une couleur plus moderne à un ensemble se mouvant jusque-là dans panoramas néo-classiques/contemporains feutrés.

De petites trouvailles fugitives en bricolages sonores plus élaborés ("Cross hands", l'éponyme "The unified field", délicat ''Open line"), le duo Piano Interrupted poursuit son cheminement créatif sans jamais oublier de se réinventer ni de faire naître ci et là des émotions d'une pureté infinie (citons la magnifique "Darkly shining"). En mixant ses velléités expérimentales et son amour pour les panoramas mélodiques à l'esthétique feutrée, la paire anglo-saxonne enfante ici d'une créature hybride aux possibilités quasi infinies, une œuvre rare aux multiples sens de lecture (''An accidental fugue'', ''Camera obscura''). Tour à tour néo-classique, jazzy et électronique, la musique de The unified field se conjugue à toutes les aspirations sonores, les couleurs stylistiques, pour livrer un album semblant ne jamais devoir se terminer (''Path of most resistance''). Pour le plus grand plaisir des sens...

Piano Interrupted / Chronique LP > Two by four

Piano Interrupted - Two by four Duo anglo-saxon habitué a composer des bande-sons pour des documentaires ou divers métrages filmiques, Piano Interrupted s'est décidé à faire la même chose... pour un long-métrage n'existant pas. Et de sortir via l'incontournable et toujours aussi prolifique Denovali Records (Carlos Cipa, Dale Cooper Quartet ou Hidden Orchestra dont les Londoniens ne sont pas si éloignés en termes de pratiques artistiques). Une idée de génie. Non mais une vraie. Parce que le concept n'est pas nouveau et nombre d'artistes ou groupes contemporains se sont déjà livrés à ce type d'exercice. Sauf que là, la paire Eric Young/Greg Hall qui réédite en réalité un premier album sorti en 2012 de manière assez confidentielle, accouche d'un petit chef-d'oeuvre.

Two by four, une oeuvre qui respire la classe et qui démontre que le duo sait tout faire. Même se moquer un peu de son patronyme. Parce que de piano (très classe) il est évidemment question dans cet album (le merveilleux "Hobi"). Mais pas que, loin de là. Une jolie dose d'electronica gracile. Des arrangements à cordes emmenant l'auditeur dans des stratosphères émotionnelles et emportant avec eux un clavier enjôleur bercé par des beats électronique renvoyant au trip-hop des 90's (la divine "Etude"), instrumentations aux violons et violoncelles que l'on retrouve sur le tribal et percussif "Hedi", preuve que les Anglais peuvent tout se permettre avec une maestria égale. Et s'ils sont aidés par un quartet à cordes en live, ce n'est certainement "que" pour donner encore plus de souffle à une musique à haute teneur émotionnelle.

Laquelle musique possède également de belles qualités expérimentales, que le duo a l'intelligence et le bon goût de ne pas noyer sous des circonvolutions absconses mais une élégance rare qui la rend aussi complexe et insaisissable qu'accessible et fascinante ("Son of pi", "London waltz"). Aux confins du trip-hop, de l'électro-jazz et du mouvement néo-classique, voire contemporain, Two by four est de fait une oeuvre riche et ténébreuse se nourrissant de textures et sonorités "world" (africaines, orientales) parfaitement assimilées ("Bulbus") dans un maelström musical qui emmène également l'auditeur vers des contrées musicales apaisantes évoquant par instants l'ataraxisme artistique d'un Sigur Ros, sans pour autant en partager toutes les sensibilités musicales ("Foug", "Son of foug"). Impossible de toutes les façons, tant Piano Interrupted apparaît comme un projet musical polymorphe (le jazzy puis électronique "Occasional blues") exhalant un magnétisme sonore à l'étrangeté troublante ("Nocturne") en même temps qu'une classe incomparable ("7 ages").

PS : en bonus, l'album se termine sur des interprétations live des titres "Etude", "London walz" et "Foug" de toute beauté... comme si cela ne suffisait déjà pas.