Après un premier album sorti au printemps dernier, Oyaarss s'est retrouvé propulsé comme l'une des nouvelles découvertes de la prolifique et pointue écurie Ad Noiseam (Balkansky, Broken note, Enduser, Niveau Zero, Subheim, The Outside Agency). Jusqu'à susciter une attente méritée et dès lors devoir exhumer sa première démo, sortie un peu confidentiellement en 2011 et remasterisée afin de lui donner une seconde vie, fort logiquement par le biais d'Ad Noiseam. En l'agrémentant d'un nouvel artwork, Oyaarss a également soigné le look visuel de ce Smaida Greizi Nakamiba qui, en plus du reste, nous offre nos premières bases de letton, ce qui peut toujours servir pour briller en société. Ou pas.
Musicalement, on reste sans surprise dans les courants de Bads, le premier album du projet, soit dans des sphères dub-step/electronica cliniques et industrielles, brossant le portrait - à l'image de la pochette - d'un paysage urbain désolé. Carte postale magnifiquement cynique et contemporaine, en forme d'instantané cinglant d'une cité d'Europe de l'Est désormais peuplée par les fantômes de son passé communiste révolu, l'album se fait l'écho des ombres qui semblent encore hanter les lieux. On fait grâce de la tracklist de cet opus en s'évitant de recourir encore et encore aux artifices du copier-coller pour mieux plonger la tête la première dans ce que réservent Arvīds Laivinieks et ses machines. Un homme-orchestre aux multiples talents d'ingénierie sonore qui se révèle encore une fois être un véritable alchimiste du son des temps modernes.
Les pistes défilent, fuyant vers un horizon bien incertain, les atmosphères s'assombrissent, se voulant parfois grinçantes, souvent énigmatiques, elliptiques. Oppressives ou à l'inverse plus aérées, épiques en certains moments même. L'agrégat sonore proposé par Oyaarss distille ses ambiances, les colle de très près de manière à mettre l'auditeur dans un état de conscience éveillée, afin d'en accroître sa réceptivité. Des arrangements aux nuances subtiles, à l'équilibre constant presque idéal, un piano qui joue la carte du néo-classicisme sur un titre avant que les machines ne reprennent le contrôle dans un maelström de sons qui s'agglomère patiemment, inexorablement, en une sorte de chaos apaisé. Ce Smaida Grezi Nakamiba n'avait beau être à l'origine qu'une démo, il se révèle être désormais un disque d'Oyaarss à part entière et la confirmation rétroactive d'un talent à part, trouvant ses inspirations dans sa terre natale comme les œuvres de George Orwell (1984) et Stanislav Lem (Solaris). Ingénieux et bluffant.
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Balkansky
Certainement l'une des figures les plus douées de la scène dubstep/drum'n'bass européenne...
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Oyaarss / Chronique LP > Smaida Greizi Nakamiba
Oyaarss / Chronique LP > Bads
Electronica / dubstep / industriel annonce l'ultra-prolifique label Ad Noiseam (Balkansky, Enduser, Subheim, The Kilimanjaro Darkjazz Ensemble...) au sujet de sa dernière production en date : Oyaarss. Un projet d'origine lettone mais basé à Londres, au patronyme assez énigmatique et dont le premier album, sobrement baptisé Bads, témoigne une fois encore du flair d'une maison de disques qui n'a plus rien à prouver sur ce segment musical, mais qui continue néanmoins de dénicher encore et toujours les productions les plus inventives et inspirées du moment en la matière. Une référence incontestable et incontestée.
"September" pose d'entrée de jeu les bases du travail d'irradiation sonore d'Oyaarss : des textures scintillantes face à des basses synthétiques et pénétrantes qui pèsent sur l'atmosphère. Une matière sonore qui se liquéfie peu à peu au contact de ses ogives dubstep électro, lesquelles jalonnent son parcours d'explosions digitales avant de retrouver sa forme initiale sur un final dont le retour à la "normalité" lui confère un côté "cyclique" enivrant. Comme l'est du reste la suite immédiate de ce premier titre : "And the sun shall rise to the south". Une ambiance propice à l'évasion ataraxique, flirtant dans la stratosphère en même temps qu'elle nous plonge dans une forme de léthargie artificielle à laquelle les textures indus/dubstep vont progressivement nous extraire. Un grand huit électronique particulièrement exigeant qui ne laisse pas indifférent.
Un cycle encore une fois, une danse des contrastes et un duel à distance entre l'aérien et la profondeur : les passages les plus ambient qui s'élève dans l'atmosphère [vs] ses beats aliénants qui sembler s'enfoncer inexorablement dans les profondeurs de la terre. On l'a compris, dans sa démarche protéiforme musicalement parlant, Oyaarss aime contrôler les émotions de l'auditeur et pour ne pas enfermer son album dans un concept trop réducteur, le fait voler en éclat sur les pistes qui suivent : "Perishable something" puis "Untitled empty breath". Plus indus, porté par un dubstep lourd et immersif, parsemé de quelques très discrètement omniprésents samples vocaux et une volonté d'enfermer le tout dans une véritable gangue d'oppression sensorielle, l'album gagne en âpreté ce qu'il "perd" en légèreté. Le contenu se veut alors plus froid, clinique, déshumanisé avant de s'offrir un retour au concept de départ. Mais cette fois en le repoussant dans ses ultimes et erratiques retranchements.
Les plages ambiantes se veulent de nouveau éthérées mais les beats encore et toujours plus écrasants, Oyaarss maîtrise son sujet : ses travaux sonores gagnent en corps et en rugosité même si l'effet de surprise s'estompe jusqu'à "Ignis fatuus". On atteint le coeur de l'album et Bads va commencer la distribution de maraves monumentales. Des claques en formes de grenades à retardement qui vont défragmenter le disque dur en même temps qu'elles vont éparpiller les décibels sur les enceintes... jusqu'à ce que les débris n'en finissent plus de joncher le sol. Dans l'intervalle, l'atmosphère s'assombrit considérablement et Arvīds Laivinieks, l'homme qui se cache derrière son pseudo donne une nouvelle dimension à son album, plus ample, plus urbaine et en même temps plus "extrême", à l'image de "The darkest shade of the face" ou "Riga street blues". Intense et salvateur ("15 drops of truth"), sombre et lumineux ("North"), Oyaarss propose ici quelques 48 minutes d'un alliage extrêmement dense et antagoniste de dubstep indus organique et d'electronica volatile. Une claque.