no one is innocent - propaganda No One Is Innocent est un groupe réactif et c'est quand les sujets sont les plus graves que Kémar excelle. On avait pu s'en rendre compte avec "La peau" ou sur Utopia, et au travers de Gazoline avec la nouvelle mouture du combo qui m'avait passablement ennuyé avec Drugstore. En 2015, le climat mondial est au terrorisme et à la résurgence de masses fascisantes qui pensent que leurs problèmes sont causés par les autres... On sent un No One Is Innocent impliqué, prêt à en découdre avec les idées comme avec les riffs, Propaganda renoue avec leur glorieux passé au propre ("20 ans") comme au figuré. Welcome back.

"Nous sommes tous Charlie" clame Paris et le Monde entier début janvier, "des cartouches d'encre contre les munitions (...) face à eux faut faire front", les slogans claquent, les mots de Zapata repris par Charb servent de texte pour que le message passe et repasse "je préfère mourir debout que vivre à genoux". Comme les textes, les guitares sont ciselées et la rythmique tabasse, aux oubliettes les sons électro surproduits du Drugstore, on laisse la place à la basse ("Silencio"), aux distos, aux frappes sèches et à un Kemar qui reprend les rènes pour traiter des sujets chauds du moment : peur globale et embrigadement explosif sur "Djihad Propaganda", les idées brunes de la sirène/hyène "Putain si ça revient", surveillance et destruction à distance avec "Drones". Et quand, le leader charismatique du groupe se fait davantage poète ("Silencio"), c'est pour tacler une présidence inopérante malgré les beaux discours... Même si c'est très agréable à écouter, son rayon, ça reste l'action et rien de tel qu'une punchline en anglais pour faire bouger même si l'essentiel reste compréhensible par tous les francophones ("Barricades", "Kids are on the run"). Pour ceux qui ne sont pas attentifs aux textes (sérieusement ?), pour bouger, il suffit de suivre les coups de baguette et de médiator parce que ça ne rigole pas et ça enquille les riffs saturés sans perdre le groove qui est aussi une de leur marque de fabrique. Quand ça se calme, comme sur "Massoud" (encore un révolutionnaire à l'honneur), on se rapproche musicalement d'un "Autobähn babies" et donc mon Graal Utopia... C'est d'ailleurs un titre ("Nomenklatura") de mon album fétiche que No One Is Innocent était venu jouer à Nulle Part Ailleurs, on retrouve le lancement d'Antoine de Caunes qui bouffe un peu leur nom pour célébrer leurs "20 ans" (un peu plus même). Dans ce titre, le groupe se met en scène (comme le faisait Silmarils ou le fait encore Mass Hysteria), se rappelant son histoire pour constater que les thèmes du début des années 90 n'ont pas forcément changé, le racisme ambiant fait toujours des ravages (de "La peau" à "Un nouveau Scottsboro") et il reste donc des chansons à écrire pour les générations qui n'ont pas encore compris qu'on habitait la même planète...

Un dernier titre punk-défouloir en anglais (chanté par Shanka entre deux alarmes) qui dénote un peu et No One Is Innocent range les guitares et le micro... Pour mieux les ressortir dans tous les coins de l'hexagone où ils mettront le feu. Putain que ça fait du bien.