NIN : The Fragile 23 titres, répartis sur deux galettes... pour une oeuvre majeure de la scène indus-metal, un album forcément long, varié, extrêmement travaillé, voilà en quelques mots ce qu'est The fragile. En effet, en 1999, après cinq ans d'atermoiements divers, de soucis personnels et de crise d'inspiration quasi identitaire, Trent Reznor, homme à tout faire de Nine Inch Nails sort un nouvel album et nous offre son chef-d'oeuvre, sobrement baptisé The fragile.
Moins violent que ses prédécesseurs, Broken et The downward spiral, cet album regorge de titres rock industriels lourds, saturés, mélodiques, nappés de sonorités pop et de passages ambient/ trip-hop ("We're in this together", "The fragile", "Even deeper"...). Entre les interludes "The frail" ou le très ambient "The mark has been made" et ses fulgurances indus, Nine Inch Nails navigue à vue entre les titres rageurs, très rock/ indus dans l'âme ("The wretched", "No you don't" et "The way out is through") ; et les titres plus pop aux textures toujours industrielles, tels que "Even deeper" ou la somptueuse ballade au clavier qu'est "La mer" ; ce, en passant par les expérimentations sonores de "Pilgrimage" ou "Underneath it all".
Comme débarassé d'une partie de ses démons, Trent Reznor se livre complètement avec "La mer" (en français dans le texte) et poursuit dans l'intime avec l'aérien et émouvant "The great below". Deux morceaux à fleur de peau où l'on sent une volonté chez Reznor de faire partager ce qu'il a en lui, tout en variant habilement les genres. Que ce soit dans les expérimentations paroxystiques du minimaliste "I'm looking forward to joining you", ou le très éléctro "Complications", Nine Inch Nails accomplit le tour de force de ne jamais faire deux fois le même morceau au cours de cet album pourtant fleuve. Reznor abandonne avec The fragile les pulsions malsaines qui l'habitaient jusque là (voir Broken par exemple) et se met à nu avec pudeur et non sans une certaine retenue. Certes, certains titres sont peut-être moins réussis que d'autres (les dispensables "Just like you imagined" ou "The big come down"), mais Nine Inch Nails parvient à se renouveler sans cesse et parsème cet opus particulièrement dense de hits ultimes tels que "The day the world went away", "Starfuckers Inc." ou "The mark had been made", et ce, jusqu'à "Ripe with decay", ultime morceau instrumental à l'atmosphère trouble qui conclut parfaitement ce nouvel opus.
Après 23 titres, on tente de reprendre ses esprits et l'on se rend compte que le génie qu'est Trent Reznor aura pris son temps, cinq ans donc, pour offrir son album le plus personnel, le plus abouti également. Une sorte de journal intime industriel, où les émotions brutes nous jaillissent violemment à la figure, où les atmosphères jouent avec les subtilités afin de définitivement exorciser les conflits intérieurs de son auteur en renouvelant un genre en soi... Définitivement incontournable donc.