The Mount Fuji Doomjazz Corporation - Egor Il n'est guère étonnant de "voir" à quel point une musique aussi exigeante que celle de The Mount Fuji Doomjazz Corporation peut faire naître en nous des réactions aussi viscérales et antagonistes selon les sorties. Et si Doomjazz future corpses puis Succubus, soit les deux premières productions du collectif, s'étaient révélés en tous points fascinants dans un registre doom/jazz/ambient aux effluves narcotiques et atmosphères troublantes, Anthropomorphic demeure encore aujourd'hui chez votre serviteur une énigme absolue, sinon dans le meilleur des cas une oeuvre parfaitement insaisissable à l'opacité quelque peu enrageante.

Egor, quatrième livraison du "groupe" est un disque live qui sied certainement mieux au concept du collectif qui, rappelons-le, enregistre sa musique dans les conditions du... live et avec une très large partie de son travail laissée à la libre improvisation de ses membres. De fait, le résultat ici est segmenté en quatre plages flirtant ou dépassant toutes le quart d'heure, sans titre, et formant un tout assez difficilement divisible sous peine de "sortir" complètement de cet matière sonore aussi palpable que clairement immersive. Une oeuvre au faux rythme laissant l'auditeur parfois à l'abandon, avec l'impression de flotter dans une atmosphère, pour mieux se perdre dans les méandres d'une musique mélangeant habilement ambient, free-doomjazz et expérimental.

Quelques bricolages sonores, textures bruitistes, climax tantôt oppressifs et suffocant, tantôt plus aériens voire évanescents, cette nouvelle cuvée signée The Mount Fuji Doomjazz Corporation se rapproche à bien des égards des travaux les plus "libres" de The Kilimanjaro Darkjazz Ensemble dont il est à la base l'émanation live/improvisée (avec un line-up un peu différent cela dit). Mais la frontière entre les deux entités est ainsi resserrée, ou tout du moins plus floue, si bien qu'au fur et à mesure que le collectif déroule son album, qu'il distille images et fantasmagories sonores à nul autre pareil, il fait de cet Egor un véritable objet de fascination musicale, s'enfonçant parfois dans les abîmes d'une musique nébuleuses et tourmentés comme réservant quelques très beau moments d'une finesse mélodique infinie. Classe.