Monsieur Z - Propagande de l'hybride Et alors, n'est-il pas possible de marquer ouvertement un virage dans son évolution ? Faut-il absolument se cantonner à toujours tourner autour des mêmes poncifs ? A la première question, la formation bisontine répond "Si !" et à la seconde, elle rétorque "Non !". Car sans suivre un changement total de cap (comme Wunjo), Monsieur Z préfère installer chaque album (même si il n'y en a que deux pour le moment) dans un univers particulier, comme l'ont fait les grands noms de la fusion française Freedom For King Kong, No One Is Innocent ou Silmarils. Tandis que du coté de Besançon, leurs cousins de Tensuo continuent de mixer électro, ragga et métal dans une prolongation volatile de D1g1tal EQ, Monsieur Z opte pour autre une grille de (re)lecture. Effectivement, pour Propagande de l'hybride, le quatuor a fait le pari de muscler le propos en donnant une teinte très rock à ses titres, en choisissant un son plus massif que son prédécesseur et en offrant la part belle aux guitares ("Le manège enchanté", "21042002") sans pour autant délaisser les parties électro, occupées par les machines ("Tu tournes en rond", intros de "Quand j'ai tendu la main", "El Che"). Le groupe ne trahi nullement ses envies de mixité des styles mais les transforme, les arrange différemment et les sers autrement agglomérées. Pourtant sans aller jusqu'à la métamorphose, puisqu'on retrouve les ingrédients-clefs de la réussite des bisontins : les messages portés ainsi que la pluralité des éléments piochés et assemblés pour les soutenir.
Des voix discordantes risquent de s'élever et de regretter la subtilité et l'accroche facile du premier album. Je leur conseillerais de se précipiter sur la dualité de "Si bas", "Pour les masses" et "Crayon à la main" qui auraient pu trouver leur place sur D1g1tal EQ, avant de se laisser embarquer par les autres morceaux, plus riches en calories et tellement prenants. Dans sa reconversion, le combo offre toujours une diversité d'expression. Ainsi, on débute Propagande de l'hybride avec des titres denses auxquels s'ajoutent une rondeur imparable ("Le manège enchanté", "Quand j'ai tendu la main") avant de lâcher la netteté de "Au fond de nos poches" et la fébrilité de "Si bas". "Pour les masses" et "El Che" pilonnent le milieu de l'album, puis, le géopoétique "Crayon à la main" vient apporter une irrésistible touche de douceur, prouvant que Monsieur Z sait toujours manipuler sa musique avec des pincettes. A noter aussi, "21042002", titre tout en tension, écrit en réaction à l'arrivé du borgne au second tour des présidentielles de 2002 ainsi que les sublimes morceaux ("Assis" et "Toujours ça ira" fermant la marche de l'album très honorablement) sur lesquels s'invitent les cordes de Agathe et Thomas (au violon et violoncelle). Au fil de sa Propagande de l'hybride on se délecte à nouveau d'entendre les textes de Z, "il faut tout foutre en l'air, démolir pour construire de nouveaux repaires", "on va être serein et on le restera jusqu'au bout", "le monopole de la merde est facile / mais il n'en ressort que de l'inutile", "c'est la loi du profit, les barèmes sont établis / seulement certains s'enrichissent tandis que d'autres périssent", sans bien sûr oublier l'apparition au chant de Djamal (ex-Kabal, In Vivo) sur l'excellent et revigorant "La peau à fleur de nerfs" ("C'est pas quand t'es à l'usine qu'on entend ta voix").
Pour les à-côtés dont on ne boude pas le plaisir de goûter, Monsieur Z ajoute quelques goodies à la galette (diaporamas, clip de "21042002" et making-of de l'album avec interventions des intéressés) et renouvelle bien légitimement sa confiance à Schawack pour la ligne graphique, du visuel de l'album au website en passant par l'interface de la plage multimédia.
Alors, Monsieur Z change légèrement d'orientation, certes. Mais les bisontins font le nécessaire pour renouveler adroitement leur répertoire tout en conservant leurs principes d'ouverture à d'autres horizons. Il ne faut pour autre preuve le fait que le contenu de cet album est en adéquation totale avec son titre, Propagande de l'hybride.