jesu_heart_ache.jpg Godflesh est bien mort et enterré. Et un peu plus d'un an depuis la fin du groupe, Jesu, le nouveau et ambitieux projet solo du phénomène Justin K.Broadrick est mis sur orbite. Mais, qui en doutait ( ?), on pense souvent à l'ancien groupe de Broadrick tout au long du premier essai discographique, enregistré aux studios Avalanche de Birmingham, de ce nouveau projet. Rien que dans son nom déjà, (Jesu étant le dernier titre de l'album Hymns de Godflesh), l'ombre de la première entité plane largement sur celle qui lui succède maintenant. Car dès les premières secondes du premier des deux titres de cet EP (pour quarante minutes de musique tout de même...), ça démarre. comme du Godflesh. C'est d'une lourdeur étouffante, tout en saturation tourmentée et oppressante, le riff de gratte limite stoner tourne en boucle, puis la mélodie fait enfin son entrée pour aérer un peu l'ensemble. Entre enfin le chant, éthéré et à fleur de peau. La qualité mélodique est étonnante, la mélancolie latente et toutes deux laissent entrevoir une petite évolution dans la musique de Justin Broadrick, à savoir qu'elle se veut peut-être moins métallique pour s'orienter vers quelque chose où tout ne serait qu'ambiances et atmosphères.
Gorgé d'effets ambiant/ indus, mélangeant guitares électriques et acoustiques, le tout au service d'arrangements aussi subtils qu'émouvants, "Heart ache" réussit parfaitement son entrée en matière et laisse à penser que la suite ne peut que mériter notre attention. Là ou le premier titre de cet EP nous faisait entrer de plein pied dans un univers sombre et lourd et dissonant, "Ruined" joue au départ la carte de la retenue. Le chaos ne saurait tarder. Mais pour le moment, le piano se fait délicat, élégant, raffiné et finalement assez posé. Et puis lentement, l'atmosphère commence à changer, comme une journée de printemps qui commencerait sous les meilleurs hospices avant que l'ouragan ne fasse oublier l'aube ensoleillée. Dès lors, la météo se fait changeante, l'orage gronde et la guitare fait son entrée. Massive, lourde, elle fait écho à une basse d'une lourdeur incommensurable et à des effets synthétiques dissonants qui ne font rien pour alléger l'ensemble. Pris dans une gangue de plomb, ce deuxième morceau nous rappelle que son auteur voit la vie de manière relativement désabusée, ce au travers d'un prisme où tout ne semble qu'être que douleur et tristesse. Justin K.Broadrick semble hanté par des fantômes très personnels et sa musique est largement empreinte de ce qui torture son âme. Mais l'homme est suffisamment doué pour ne pas trop se mettre en avant et parvient à s'effacer derrière son oeuvre. Car au final, Heart Ache, est un EP qui sait trouver sa voie, entre ambient industriel torturé et rock atmosphérique douloureusement mélancolique et qui annonce des lendemains sombres mais excitants pour Jesu.