Filastine - £oot A l'écoute de Loot, son troisième album, Grey Filastine n'a rien perdu de sa personne. Tel un Manu Chao, pour ne citer que lui, cet itinérant parcourt sans cesse le monde à la recherche des sons qui dépassent rarement les frontières pour les immerger par la suite dans un bouillon électro dont lui seul a le secret puis, in fine, les diffuser là où son chemin s'arrête, à l'instant T s'entend. Car ce Barcelonais d'adoption fait feu de tout bois pour garder cette ligne artistique nourrie à la fois d'ambiances tribales, balkanes, hindoues, arabisantes (et j'en passe) voire plus occidentales où le sillon laisse une saveur hip-hop électrique très plaisante, sans parler de tentatives qu'on pourrait qualifier de dubstep sans le côté putassier. De la matière pour tester la résistance de vos subwoofers et de vos tweeters.

Ce citoyen du monde ascendant activiste social (rappelons que Filastine est un ex-membre percussionniste de The Infernal Noise Brigade, groupe monté pour protester contre l'organisation du meeting de l'OMC à Seattle en 1999 qui avait alors connu d'importantes émeutes) vient littéralement transformer son ambition musicale en un manifeste contre l'ordre établi, le pouvoir pourri par l'argent et la destruction progressive de la morale et des valeurs. Pour faire passer son message, cet explorateur s'entoure de personnalités totalement atypiques telles que Nova, une poétesse indonésienne, sur les titres "Colony collapse" et "GenDJer2", ou le duo de rappeurs japonais ECD qui pour l'occasion vient vagir sur le nucléaire dans "Lost records", un morceau doté d'un beat bâti autour des cliquetis d'un compteur Geiger. Filastine se moque donc des codes et l'effervescence de chacune de ses offrandes ethno-électro enivre au plus haut point car non rébarbatives.

L'exotisme inclassable et orgastique de Loot est le témoignage sonore d'une vie, d'une démarche personnelle faite de rencontres et de partages à travers le monde. Mixé sur le toit d'un studio du quartier musulman de Barcelone, cet album respire la liberté et la richesse de cultures mangées par la globalisation.