EZ3kiel - La mémoire du feu Inclassable, EZ3kiel l'est depuis toujours. Avec La mémoire du feu, ils le deviennent encore plus avec ce nouvel album qui restera "à part" dans leur discographie quoi qu'ils fassent par la suite. Parce qu'il ne ressemble en rien à ce qu'ils ont fait avant et je ne les imagine pas réitérer l'expérience (à quoi refaire la même chose ?). Cette œuvre est la mise en musique d'une nouvelle de Caryl Ferey avec de nombreux emprunts aux textes de l'auteur de polar et donc des voix, celles des deux personnages principaux, celle d'une narratrice, des voix qui chantent un peu et qui incarnent beaucoup presque comme si on était au théâtre. Le résultat est d'abord dérangeant, les premières écoutes sont très déstabilisatrices, puis complètement excitant quand on s'accroche à l'histoire, ses héros et leurs textes, plus on connaît l'opus, plus on découvre des choses, plus on en profite, plus on comprend le travail des musiciens en rapport avec le reste, plus on retrouve EZ3kiel.

La voix grave Benjamin Nerot (The Healthy Boy) apporte une sorte de cadre assez massif ("Diaphane", "La mémoire du feu") alors que celle de sa comparse Jessica Martin Maresco (Le grand SBAM, ICSIS, Pili Coït...), très douce, virevolte avec les notes des Tourangeaux ("Les galions oubliés", "Les bras des torrents"). Les timbres comme les mots accaparent notre attention car ils sont nouveaux dans cet univers, un monde qui s'est quelque peu effacé laissant de la place à davantage de parties électro ("Les amants d'antan", "Les spirales ascendantes") mais une patte qui refait parfois surface avec plus ou moins de fracas. La signature EZ3kiel, ce savant mélange d'influences et de sons porté par une dynamique organique éclate et nous emporte sur "Serpent corail" puis nous ébouriffe sur "Rouge sang".

Il te sera difficile de te "faire une idée" de l'album en en n'écoutant que quelques morceaux, il va falloir l'appréhender dans son intégralité et plusieurs fois pour en percevoir les subtilités, il en va ainsi de nombreux albums conceptuels narrant des aventures, depuis l'Histoire de Melody Nelson de Serge Gainsbourg (les protagonistes ont aussi un côté "Bonnie and Clyde") jusqu'au plus récent And so be it Anita de Bonbon Noir), des pépites qui grossissent au fur et à mesure que l'on creuse...