Thomas B. Allemand. C'est à peu près tout ce que l'on peut dire de la biographie de Bersarin Quartett, un projet emmené par... un seul homme et initié depuis 2005-2006. En 2008, l'homme signe chez Lidar Productions, label via lequel il sort un premier album, éponyme, qui met la critique (ultra) spécialisée à ses pieds. Deux ans plus tard, le disque se voit faire l'objet d'une réédition plutôt classe par le nom moins classe label Denovali Records (Heirs, Les Fragments de la Nuit, Mouse on the Keys...).
Bersarin Quartett
Biographie > 1 = 4
Bersarin Quartett / Chronique LP > II
Bersarin Quartett, c'était il y a deux années de cela, à l'époque de la réédition par Denovali du premier album du bonhomme, un disque qui avait déjà deux ans de plus mais qui surtout s'était révélé comme une merveille de mélange electronica/ambient/post-pop/nu-jazz. Une première oeuvre, sous ce patronyme, à la cinégénie rare et qui faisait voyager l'esprit à travers le temps en même temps qu'il l'apaisait d'une manière assez fascinante. Ce que l'on appelle un bijou... à la limite du chef-d'oeuvre. Deux et (donc quatre) ans plus tard, II, le... deuxième abum du compositeur/arrangeur/producteur allemand (qui fait toujours tout ça tout seul) propose la même chose... mais en mieux. Si c'était possible finalement.
Intro ambient languissante, on se laisse glisser dans les atmosphères cotonneuses et ouatées de "Niemals zurück" avant que "Zum Greifen nah" ne vienne littéralement nous happer, pour nous inviter à explorer de nouveau l'univers cinématographique de Bersarin Quartett. Des créations à l'évanescence sublime, des esquisses mélodiques d'une beauté infinie et des arrangements d'une subtilité bluffante, l'auteur livre ici une partition d'une classe folle, composant ici plusieurs bande-son de films inexistant en un seul album, agglomérant tout une collection de pistes musicales aux ambiances captivantes et troublantes ("Im Lichte des Anderen"). Les plages sonores se suivent et ne nous lâchent plus, habitant complètement notre esprit qui leur sert alors de réceptacle dans lequel elles trouvent un écho des plus absolu.
Ambient/électronica onctueusement velouté, post-rock fugitif, pop scintillante et nu-jazz ("Der Mond, der Schnee und Du"), la griffe musicale de Thomas B. (l'homme derrière le patronyme de Bersarin Quartett) a beau être maintenant connue, elle n'en reste pas moins capable de se sublimer régulièrement, jusqu'à expédier l'auditeur dans des sphères émotionnelles quasi inexplorées (le sublimissime "Perlen, Honig oder Untergang"). Douze morceaux couchés ici sur disque pour près d'une heure de musique, on se dit que ça n'a rien de réellement très bref et pourtant jamais on ne sent le temps s'écouler ("Einsame wandeln still im Sternensaa"), porté par cette trame mélodique qui se déroule sous nos yeux (et tympans) et fait de ce II un disque tantôt enivrant, tantôt poignant, tantôt troublant, souvent les trois à la fois ("Im Glanze des Kometen", "Alles ist ein Wunder"). L'immersion sans filin ("Rot und Schwarz") y est donc plus que vivement conseillée ("Keine Angst")...
Si l'éponyme Bersarin quartett était un presque chef-d'oeuvre : à l'image de morceaux comme "Hier und jetzt" ou "Jedem Zauber wohnt ein Ende inne", II est lui une authentique merveille.
Bersarin Quartett / Chronique LP > Bersarin Quartett
Imaginary fictional filmscores
Inlassable découvreur de talents et pépites (encore) méconnues, le label Denovali Records ne semble avoir aucune limite. Hardcore, metal, noise-rock, ambient, electro, post-classique ou fusion jazz hors-norme, la seule constante semble être ici la qualité, l'émotion pure qui se dégage de chacune des sorties du label. Une prise de risque constante, un (très) haut niveau d'exigence tant sur le fond que la forme (l'aspect "physique" des productions du label est soigné comme rarement) et un rythme de sorties qui ne semble jamais connaître d'essoufflement et donc de magnifiques réussites. On a eu les Celeste, Her Name is Calla, Les Fragments de la Nuit, Kodiak, Nadja et autres Mouse on the Keys ou The Kilimanjaro Darkjazz Ensemble, voici maintenant une petite offrande germanique en forme de ballet electronica/ambient/post-pop/jazzy signé Bersarin Quartett.
Cinégénique, la musique de ce compositeur allemand qui fait apparemment tout en solo (on ne sait que le strict minimum de sa biographie...) possède d'étonnantes propriétés évasives, un souffle harmonique planant et cotonneux qui renvoie l'auditeur aux univers de Sigur Ros ou The Cinematic Orchestra, aux expériences sensorielles du Kronos Quartet ou aux travaux ds incontournables Angelo Badalamenti (compositeur attitré de David Lynch) ou Clint Mansell. Lumineuse ("Oktober", "Inversion"), elle est un appel à l'introspection, une sorte d'immersion dans des territoires inconnus où l'âme se dissocie du corps pour se laisse porter par une trame mélodique aussi élégante que satinée. Il y a des invitations comme ça qui ne se refuse pas. Orchestration symphonique fugitives, un clavier qui parsème l'ensemble de quelques arpèges épars ("St Petersbug"), une electro délicate et veloutée ("Die Dinge Sind Nie So Wie Sie Sind"), une pluie de détails, des sonorités qui s'entrecroisent, trip-hop enfiévré ("Mehr Als Alles Andere") convulsions légères ("Nachtblind"), un mélange de haute précision, habité par la vision unique de son auteur. Brillant, minimal mais incroyablement précieux...