Ben Lukas Boysen - Gravity On n'insistera jamais assez sur l'importance qu'ont certaines structures défricheuses de talents et nouveaux horizons sonores sur notre quotidien de mélomanes plus ou moins avertis : ces labels qui, en plus d'étancher en permanence notre soif de découvertes, nous abreuvant de pépites sonores mettant nos sens en éveil, le font avec une régularité effarante, une ligne éditoriale à l'exigence plus ou moins expérimentale irréprochable, ce, en adoptant un modèle économique quasiment pérenne. Là on pense invariablement à Ad Noiseam, Denovali Records et quelques autres et c'est ici le premier nommé qui revient encore une fois (comme souvent) sur notre radar, avec une nouvelle production : Gravity signé Ben Lukaas Boysen.

Plus connu dans les sphères électroniques sous le pseudo de Hecq par le biais duquel il s'est déjà rendu responsable de nombreux coups d'éclats soniques, l'Allemand œuvre ici sous son nom propre en s'éloignant assez clairement de ce qui a fait son succès (mérité) avec un disque d'ambient/post-rock aux discrètes touches électroniques (difficile de chasser le naturel) et à la classe incomparable. Un petit chef-d'œuvre qui dès l'inaugural "Only in the dark" fait succomber l'auditeur dans un état de coma semi-conscient certes mais complètement ataraxique. Entre minimalisme feutré, raffinement gracile et élégance satinée, "Nocturne 1" puis "To the hills" développent la trame narrative de ce qui ressemble alors de plus en plus à la bande-son d'un film qui resterait à être tourné. Mais surtout, ce qui frappe à la découverte de Gravity, c'est la capacité qu'a son auteur de distiller des mélodies qui confinent au sublime avec une constance étourdissante.

Un "You'll miss us one day" néo-classique et magistral lorsque les notes de claviers viennent pleuvoir sur la partition, Ben Lukaas Boysen y va en douceur, égrenant ses compositions sur du velours avant de lâcher la merveille absolue de l'album. Le morceau qui lui donne son titre et qui, quelques six minutes et seize secondes durant, met tout le monde en orbite interstellaire. Impossible de s'en remettre et pourtant, il faut bien continuer à explorer les méandres de l'œuvre du petit génie qui en profite pour aller encore un peu plus loin dans son cheminement créatif avec "Eos" et "Nocturne 2". Soit deux nouvelles pièces d'orfèvrerie sonore pour lesquelles le génial compositeur/producteur et sound-designer fait encore une fois des merveilles avant de boucler la boucle sur l'ultime et quelques fois énigmatique (mais étrangement fascinant) "The Behinian gospel" final.

La (très) grande classe.