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Initialement projet mené par un musicien canadien spécialiste des musiques "experimentales", Martin Dumais, Aun est un projet drone aux tendances ambient et industrielles qui voit le jour au milieu des années 2000 et qui rapidement enchaîne les sorties, relativement confidentielles mais remarquées dans les sphères indé, voire underground. Multipliant les collaborations avec les labels Alien8 Recordings (Keiji Haino, Merzbow, Nadja, Set Fire to Flames...), Important Records et Crucial Blast Records, Martin croise alors la route de l'artiste visuelle et elle-même musicienne plutôt orientée ambient Julie Leblanc qui se met alors à "illustrer" sur scène les lives du projet. Lequel devient rapidement un duo, Julie intégrant officiellement Aun à l'occasion de l'enregistrement studio de Motorsleep, un disque qui paraît en 2008 via Alien8 Recordings et qui est suivi un an plus tard par VII (Important Rcds). Courant 2010, le duo signe chez Cyclic Law puis Denovali Records et publie Black pyramid, célébré comme il se doit par la critique spécialisée.

Aun / Chronique LP > Phantom ghost

Aun - The phantom ghost Depuis qu'il est devenu un duo, Aun semble avoir trouvé un rythme de croisière en matière de sorties relativement élevé. Motorsleep, VII, l'année suivante, Black pyramid il y a à peine plus de douze mois et Phantom ghost aujourd'hui. C'est donc au sein de cette scène ambient/drone (et de ses milles déclinaisons) foisonnante actuellement qu'évolue toujours le projet canadien pour toujours se renouveler, en parvenant album après album à concevoir puis bâtir un édifice musical de belle ampleur, à l'architecture changeante. Car s'il publie des albums à une cadence soutenue, avec une régularité confondante, Aun ne tombe pas dans l'excès de certaines entités qui de part leur nature, livrent 2 à 3 disques par an sinon plus (Jesu, Merzbow souvent, Nadja aussi parfois...). Là en l'occurrence, les deux derniers efforts en témoignent, le projet n'a certainement pas dévoilé tous ses secrets et Phantom ghost en est l'exemple idéal.
Sur ce nouvel opus, Aun se rapproche de la démarche d'un N ou d'un Thisquietarmy, même si le contenu artistique diverge quelque peu - il n'est pas non plus à des années lumières de ses compagnons de label - preuves en sont "Phantom" dans ses longues nappes ambient éthérées puis "Out of mind" et sa dynamique shoegaze/drone/industrielle qui sonne comme du Jesu en mode "pop". Le rendu est assez noisy, psychédélique par moments aussi et lorsque "Travellers" vient distiller sa mélodie répétitive, portée par des fragments de voix, lointaines, c'est pour mieux identifier chaque piste dans son unicité, chaque morceau dans son individualité. Aun n'a pas fait de son Phantom ghost une oeuvre monochromatique mais quelques chose de plus varié, tant dans ses approches que dans ses effets ("Orga II"), toujours aussi maîtrisés même si "Nineteen eighty-four" peut paraître un peu abscons, sinon ascétique dans son écriture drone minimaliste et sur-saturée. La prise de risque est constante et l'immersion dans ce type de musique demande un certain effort, même si les canadiens semblent ici avoir pris ce paramètre en compte, la mise en route de l'album étant des plus accessibles là où les morceaux les plus exigeants se trouvent sur la seconde partie du disque ("Light years", "Ghost"). Pour le reste, cela reste une réussite intelligemment ficelée...

Aun / Chronique LP > Black pyramid

Aun - Black pyramid Aun est une exception. On le dit de suite comme ça ce sera fait et ce ne sera donc plus à faire. Multipliant les sorties depuis 2006, l'entité solo devenue duo (cf : bio), passée par Important Records, Alien8 Recordings, Crucial Blast et maintenant Cyclac Law (et bientôt Denovali) autant dire des pointures, est devenue une référence dont on parle désormais avec un certain respect dans les hautes sphères des musiques drone/ambient expérimentales (donc un brin égocentriques...). Et pour cause, là où la très large majorité des groupes et autres one-man bands cherchent à tout prix à ne faire qu'immerger leur "musique" dans les abîmes d'un underground caverneux, torturé et oppressif, en clair, enfoncer des portes ouvertes pour user de métaphores, la paire canadienne tend à respecter ce dogme artistique fondamental tout en allant également vers son opposé. Tant et si bien bien que Black pyramid, s'il laisse sa part d'ombre envahir largement les plages qui le compose, tend par moments aussi vers ce que l'on pourrait qualifier d'élévation cosmique.
Drone/ambient, éthéré, spatial ("Phoenix", l'éponyme "Black pyramid"), l'album n'est pas qu'un monolithe de saturation bruitiste, une masse aliénante nous emmenant vers des territoires parallèles où notre état de conscience est mis à rude épreuve, il est également un voyage à travers des espaces apaisés, des déserts lunaires, comme débarrassés de toute forme d'anxiété, de tourments, d'émotions humaines (?). Sur "Taurus ten" plus qu'aucun autre morceau de cet album, Aun se révèle être à l'image de son artwork. Cette pyramide lévitant dans des sphères nuageuses évoque assez clairement les travaux du romancier/auteur de BD Enki Bilal sur sa trilogie "Nikopol", l'orage électrique qui l'enveloppe faisant écho à l'apaisement absolu des passages décryptés précédemment et que l'on retrouve notamment avec "2095". Entre-temps, les canadiens auront livré leur version de l'apocalypse drone avec un "Ursa major" magistral et suffocant, lesté de nappes ambient plombées par des textures industrielles oppressives, avant de repousser un peu plus loin ses propres frontières avec l'épilogue de Black pyramid : "Shining". Une créature musicale hybride plongeant cette fois dans les profondeurs abyssales d'un drone/ambient post-industriel, noir et labyrinthique. Bluffant.