MetallicA @ Sonisphere 2011 MetallicA @ Sonisphere 2011 Salut Salomon. Merci beaucoup de consacrer un peu de ton temps pour répondre à cette interview ! Pour débuter peux-tu présenter tes activités et ton background en quelques mots.
Je m'appelle donc Salomon Hazot, j'ai 58 ans et j'ai commencé dans ce métier en 1978. C'était un hobby que j'ai eu la chance de transformer en profession. Et je n'aurai jamais imaginé pouvoir l'exercer pendant 35 ans. Le métier de producteur de spectacles est compliqué, et il est devenu difficile. Mais, si l'on est prudent, que l'on ne prend pas la grosse tête et que l'on garde en tête que les artistes ce n'est pas nous, mais les autres, tout continuera à bien se passer.

Amnéville, en Moselle, accueille une nouvelle fois le Sonisphere français qui va souffler ses trois bougies. Pourquoi avoir choisi cette ville ? Quels sont, selon toi, ses avantages et ses inconvénients ?
Historiquement, l'Est de la France est l'un des berceaux du rock et du metal, la proximité de la Belgique, l'Allemagne, la Suisse ou le Luxembourg jouant beaucoup aussi. Le site du Snowhall d'Amnéville propose une configuration idéale pour organiser un festival, grâce à sa taille et les aménagements qu'il propose notamment. Après, c'est une région qui connaît de fortes difficultés économiques, peut-être un peu plus qu'ailleurs en France. Je sais que l'argent ne pousse pas sur les arbres, et c'est aussi pour cela que nous faisons en sorte de proposer des prix de places décents avec une programmation et des aménagements tout aussi bons. Nous voulons que le plus de personnes possibles aient la joie de pouvoir venir. De plus, nous y avons trouvé des partenaires fiables et professionnels, notamment le Galaxie d'Amnéville avec qui nous travaillons toute l'année et avec qui nous sommes sur la même longueur d'ondes.

J'ai couvert pour le W-Fenec la première édition qui a marqué les esprits en accueillant le Big Four et une multitude de groupes sur deux jours.Au vu des headliners, on aurait pu penser que cette édition serait la seule, histoire de faire un « coup ». Et toutefois, en 2012, rebelote, c'est reparti pour un tour. Dès le début, l'organisation savait que de nouvelles éditions seraient proposées ? Y a t'il une volonté d'imposer le festival dans la durée ?
Pour savoir si quelque chose fonctionne il faut l'essayer. Nous souhaitions effectivement pouvoir faire de ce rendez-vous un événement récurrent et vu comme les choses s'étaient déroulées, il n'y avait aucune raison de ne pas recommencer !

J'ai de très bons souvenirs musicaux de cette première édition, mais je cauchemarde encore des conditions dans lesquelles le festival s'est déroulé : parterre dangereux et incommodant, entonnoir pour rejoindre les stands de restauration et de buvette, parking non éclairé la première nuit, sans parler du drame évité lors de l'ouverture des portes le samedi et la cohue suscitée par l'accès au pit. Objectivement, et avec le recul, comment expliquer qu'une société organisatrice de votre renommée ait pu commettre des erreurs de « jeunesse » ?
Comme je l'ai dit précédemment pour savoir si quelque chose fonctionne, il faut l'essayer. Chaque grand événement, dans sa première édition, connaît quelques défaillances, qu'il saura ensuite régler. Il est facile de tout prévoir en théorie, la pratique est souvent différente. La préparation de nos événements requiert beaucoup de travail, mais parfois des défauts se révèlent. Nous avons pris en compte l'ensemble des remarques qui ont pu nous être faites afin d'arriver aujourd'hui à un niveau d'organisation, de sécurité et de divertissement optimal pour tous.

J'imagine qu'après le succès rencontré par la première édition, tu as du passé quelques nuits blanches après les péripéties de la deuxième édition où vous avez accumulé les déconvenues (annulation du Sonisphere anglais avec pour répercutions des annulations pour l'édition française, l'annulation de la tête d'affiche 48 heures avant le début du festival, événements climatiques du dimanche....). Comment se relève t on d'une telle déconvenue et, j'imagine, d'une énorme frustration, quand le sort s'acharne sur l'organisation ? Le fait d'avoir les « reins solides » financièrement (tu avais parlé d'un résultat négatif à 7 chiffres dans une interview dans un canard local) vous a-t-il permis de rebondir rapidement sur une troisième édition ?
L'année dernière était effectivement très dure. Il y a eu beaucoup d'argent de perdu, mais mon métier de chef d'entreprise fait que je sais gérer les pertes autant que les gains, comme tout chef d'entreprise. Je sais ce que c'est de gagner de l'argent, je sais aussi ce que c'est que d'en perdre. Je sais gérer cela. Comme pour tout, il y a des années avec et d'autres sans. Nous ne nous sommes pas découragés pour autant et sommes repartis de plus belle pour préparer l'édition 2013.

Loudblast @ Sonisphere 2011 Loudblast @ Sonisphere 2011 La programmation de cette nouvelle édition est une nouvelle fois riche pour tous les amateurs de métal dans le sens large du terme avec la venue d'Iron Maiden, mais aussi Limp Bizkit, Slayer, Korn, Motörhead, sans parler des groupes en développement comme Ghost. Quel est le « calendrier » d'un organisateur de ce type de manifestation pour mettre en place une telle affiche, entre les premiers contacts et la signature des contrats ?
Un festival se prépare d'une année sur l'autre. Une fois que l'édition 2012 a été terminée, il a fallu commencer à réfléchir aux têtes d'affiche pour l'année suivante. Je n'aurai jamais pensé qu'on en arrive là et qu'il faille s'y prendre autant à l'avance mais à l'heure actuelle il y a plus de festivals que de week-ends durant l'été. En effet, s'il y a 10 ou 12 festivals en Europe le même week-end, comme c'est le cas pour Rock en Seine par exemple, les artistes peuvent choisir trois villes maximum et vont donc aller là où il y a plus d'argent, c'est ainsi qu'entre en scène le critère financier. En dehors de cela, le planning de l'artiste ou du groupe doit s'accorder avec la saison estivale des festivals en Europe.

Le festival, qui se déroulait jusqu'à maintenant en juillet, a été avancé d'un mois (8 et 9 juin 2013). Iron Maiden, groupe convoité par le Hellfest depuis des années et qui se déroulera fin juin, est une exclusivité nationale pour le festival. Le Hellfest, par l'intermédiaire de son programmateur Ben Barbaud, n'hésite plus à évoquer le fait que le groupe semblait disponible pour son festival et que le tourneur des Anglais savait pertinemment que le groupe jouerait au Sonisphere. On ne va pas se mentir ou user de la langue de bois, c'est tendu entre vous et le Hellfest. Le fait de programmer le festival avant le Hellfest semble également un moyen supplémentaire de les emmerder. Qu'as-tu à répondre à ça ?
Le Hellfest n'avait pas de problème à se produire deux semaines avant le Sonisphere auparavant. Mais semble plus gêné d'être deux semaines après. Nous n'attaquons pas le Hellfest, nous ne sommes pas en guerre. Nous coexistons, avec nos différences et nos similitudes.
Je pense qu'il faut se souvenir que si le Hellfest en est là aujourd'hui, c'est en grande partie grâce au travail que j'ai pu y accomplir pendant de nombreuses années. Donc, si je n'avais pas voulu qu'il existe, je n'aurai pas travaillé dans ce sens. Le Sonisphere n'a jamais eu vocation à aller à l'encontre du Hellfest. Je le répète, nous travaillons différemment, avec une expérience, des méthodes, des bases différentes.

Je ne voudrais pas en remettre en couche avec le Hellfest, mais ce festival qui est clairement un concurrent, chante sur tous les toits que le Hellfest et le Sonisphere, c'est le festival de la passion contre le festival du pognon. C'est imagé, j'imagine que ça t'es revenu aux oreilles, encore une fois, qu'à tu as répondre à ça ? Franchement, n'y a t-il pas la place, en France, pour deux festival d'envergure sans qu'on parle de concurrence ?
Financièrement, puisque c'est une grande part de notre travail, nous n'avons pas les mêmes bases. Nous travaillons différemment. Mais si je n'avais pas été un passionné, j'aurai arrêté depuis longtemps ce métier.
Nous proposons moins de groupes, mais c'est un parti pris. En général vous allez à un festival de 14h à minuit. Soit 10h. Si vous souhaitez réellement profiter de tous les groupes, vous ne pourrez en voir que 10 à 12 par jour. Et nous souhaitons que vous puissiez profiter de tout. Des artistes en festival j'en ai vu pendant 20 ans, en tant que fan, et c'est donc notre volonté que de ne pas mettre trop d'artistes sur un festival la même journée : notre but est que le festivalier puisse voir tous les concerts s'il le souhaite.
Nous avons toujours considéré qu'il y avait de la place pour les deux festivals.

Le Sonisphere dispose d'un réseau d'artistes important et de moyens, j'imagine, également importants. A l'échelle nationale, quels sont, à plus ou moins long terme, les objectifs du festival en termes de développement ?
Je travaille depuis plus de 35 ans dans ce métier et depuis presque aussi longtemps avec des groupes comme Metallica ou Iron Maiden, il me semble donc logique que je continue à travailler avec ces artistes aujourd'hui. Nous continuerons à grandir tant que cela est possible, tout en restant prudents et tout voulant satisfaire le plus grand nombre.

J'imagine que tu ne me donneras pas de chiffres en ce qui concerne le budget global du festival et l'enveloppe consacrée à la programmation (mais rien ne t'empêche de nous donner ces chiffres), mais que vaut un Limp Bizkit ou un Korn qui ont connu leurs heures de gloire dans les années 2000 par rapport à un Smashing Pumpkins de la belle époque qui brassait 900.000 F pour enquiller 90 minutes sur la grande scène des Eurocks en 97 ? Sans donner de chiffres, quels sont les groupes dont tu sais pertinemment que tu ne pourras jamais envisager la venue sur ton festival ?
Les données financières ont complètement évolué depuis les années 90. Le monde de la musique n'est plus le même, il faut simplement apprendre à travailler avec les artistes et avec le public en répondant au maximum aux attentes de tous.

Sonisphere Comment ça se passe au niveau des relations entre le festival et les organes institutionnels ? Certainement qu'au départ, certains ont dû avoir peur d'accueillir un festival métal sur leurs terres, ou ont dû subir certaines pressions, mais le département n'y trouve t-il pas son compte de compter parmi les évènements culturels un festival drainant un public qui participe, du moins le temps d'un week end ou d'une semaine, à l'activité économique du "pays" ?
La région accueillant le Sonisphere a connu et connaît encore d'importantes difficultés. Toutefois, elle n'a cessé de montrer sa volonté d'être attractive notamment en matière de loisirs avec notamment tout ce que peut proposer le site du Snowhall Parc (Casino, Galaxie d'Amnéville, Snowhall, Thermes etc). Nous entretenons d'excellentes relations avec la ville, le département et la région.

Encore des chiffres...peux tu nous donner les chiffres clés du festival (nombre de bénévoles, hectolitres de bières, nombre de festivaliers attendus, kilomètres de câbles, nombre de patches Def Leppard dans le public, kilogrammes de cocaïne dans les loges, rapport Les Paul Gibson / Stratocaster Fender...).
On en reparlera après le festival !

L'interview touche à sa fin.elle est même terminée.si tu as quelque chose à ajouter, c'est le moment.merci pour ta disponibilité et rendez-vous à Amneville en juin prochain.
Nous espérons sincèrement que vous aurez la joie de nous rejoindre à Amnéville les 8 et 9 juin prochains !