3 jours de métal hurlant, 3 jours de décibels, 3 jours de saturation, ce Hellfest cuvée 2008 est une très bonne cuvée et ce n'est pas les producteurs de Muscadet de la région qui vont le contredire.
Hellfest 2008 : Clisson
Troisième édition du festival de l'enfer, ce Hellfest 2008 est une édition d'un autre accabit, après deux années de jeunesse et de maturation, le festival voit maintenant plus loin et affiche clairement ses ambitions, rivaliser avec les autres grands festivals de métal européens comme Rock Am Ring, Grasspop ou Wacken Open Air. Une affiche plus éclectique, une attention particulière pour les médias étrangers, espagnols et italiens notamment (au détriment de certains webzines...), une certaine fierté à avoir plus d'une cinquantaine de nationalités présentes sur le site, l'aéroport de Nantes à moins d'une heure du site, le Hellfest joue la globalisation.
Cette édition sera marquée par un changement dans l'équipe organisationnelle, l'agencement et aménagement du festival s'en trouvant grandement améliorée : plus de toilettes, des points d'eau bienvenus surtout en plein soleil alors qu'il est impossible d'introduire des bouteilles d'eau sur le site, un système de scène principale/scène secondaire revisité, les deux scènes ne jouant alors jamais en même temps (on se souviendra de Neurosis lors du Hellfest 2007). La mécanique Hellfest est bien rodée, huilée avec passion et tourne à la perfection. Un groupe toutes les heures sur la discovery stage, avec même des combos qui démarrent en avance, l'infrastructure est impeccable, aucun problème de son majeur à déplorer sur les scènes principales, si l'on excepte l'humour des NoFX qui rejouent la même chanson après avoir coupé le son. Le festival se paye même le luxe d'avoir son propre journal édité par Paplar chaque jour.
Ce succès du Hellfest, relançant un peu l'intérêt pour les musiques dites extrêmes en France, ne plaît pas à tout le monde, si l'on en juge par les actions du collectif Clisson sans Hellfest peu amène envers le festival et ayant cherché, du reste, à annuler cette édition. Parallèlement au festival, comme l'année précédente le Hellfest se déplace off-site dans la ville même de Clisson, avec Grum Lee et ses adaptations acoustiques des standards du métal et avec la fanfare bordelaise Pastor of Muppets faisant également des reprises du même genre. Autant d'actions pour intégrer le festival dans la commune, une initiative qui profitent pleinement aux commerçants et à l'office du tourisme.
Le beau temps étant au rendez-vous pour l'édition 2008, cette année n'a pas été marquée par la boue et la débacle déplorable du camping de l'édition 2007, cette année aura seulement vu quelques voitures embourbées sur le parking officiel du site, vaguement empaillé pour réduire les problèmes. Un gros soleil et une édition presque à guichets fermés ont fait de ce Hellfest 2008 une excellente cuvée.
Vendredi 20 juin
Hellfest 2008 : Les décors de Monic la Mouche
Avec moins de grosses têtes d'affiche, cette édition 2008 présente plus de groupes et surtout une Discovery Stage qui tourne à fond, scène à part entière qui rivalise sans problèmes avec le combo scène principale/scène secondaire. Ce tryptique scénique est une formule qui marche à la perfection pour cette édition avec assez peu de chevauchement et toujours un groupe intéressant à voir. Vendredi, c'est un peu la mise en bouche, un aperçu de ce que le festival réserve à son public, dans quelles conditions, etc... Cette édition est intense, démarrage à l'aube, à midi pétante pour être plus précis et tombée de rideau aux petites heures de la nuit soit vers 2h du matin.
Un démarrage brusque et violent, Ultra Vomit sur la scène principale et Red Mourning sur la Discovery Stage, les retardataires n'avaient qu'à se dépêcher, se lever plus tôt ou être sur le site le jeudi soir. Vainqueur du tremplin Rock Hard, c'est avec plaisir que l'on voit Red Mourning sur le line-up. Dommage d'être arrivé plus tard...
Alchemist, un des nombreux groupes de Relapse Records présents à cette édition, délivre un set carré, efficace et se livre sur scène beaucoup plus que sur leurs albums, le headbanging est de rigueur et les titres particulièrement bons. Gros riffs et des australiens visiblement très content d'être là, les titres de Trypsis sont taillés pour la scène et le public qui les découvre en redemande.
Hellfest 2008 : Le bateau pirate
Premier changement de scène, un changement de programme rare parmi cette mécanique aux rouages bien huilés, Bleeding Through débarque sur le slot de Madball en milieu d'après midi sur la scène secondaire et un créneau horaire qui leur convient parfaitement. Le groupe réveille le festival et met le feu à un moshpit furieux, riffs extrèmes, chant brutal, un clavier qui emprunte au black métal, Bleeding Trough met à feu et à sang un public survolté : tout le monde en redemande. Un set magique, la bonne surprise de cette après-midi.
En attendant avec impatience les prochains groupes de la Discovery Stage, Paradise Lost prend possession de la Main Stage et écoule son stock de titres du dernier album mais aussi de Symbol of Life, avant de cèder la place à un Sick Of it All qui démonte méthodiquement la scène, le hardcore des new-yorkais n'ayant pas pris une ride et comporte toujours sa cohorte d'afficionados. Kruger débarque finalement sur la Discovery Stage, pour y mettre le feu et délivrer son hardcore avec dévotion et maîtrise, un set concentré, dense, "Hummers VS pedestrians" est toujours aussi assassin, une ambiance beaucoup moins intime que pour leur concert au Purple Turle (voir Pooly vs Kruger (Mars 2008)), mais tout aussi intense, avec un chanteur toujours enclin à grimper les structures métalliques à sa disposition. Les petits suisses se donnent corps et âmes pendant un set forcément trop court. Alors que sur la scène principale c'est Dimmu Borgir qui se trémousse avec son spectacle grand guignol, juste derrière c'est Baroness qui enchaîne. Autant Baroness est sublime sur album, autant leur set ne parvient pas à convaincre, un son un peu médiocre, une symbiose avec le public qui va en s'étiolant, des titres qui ne passent pas la barrière du live, une déception que l'on parviendrait presque à leur pardonner après une réécoute de The red album. Pour pallier à cette déception, Testament débarque sur la Second Stage avec son thrash métal qui castagne, les américains délivrent un set carré qui s'écoute avec nonchalance. In Flames s'empare alors de la scène principale pour un show monstrueux : des lights magnifiques et des effets pyrotechniques qui embrasent l'air (en même temps lorsque l'on s'appelle In Flames on ne peut pas ne pas avoir de flammes sur scène...), alors que l'on aime ou pas, le show d'In Flames ne laisse pas insensible.
Samedi 21 Juin
Démarrage tout doux pour ce samedi ensoleillé, les hostilités ne commencent vraiment qu'en milieu d'après-midi, un break idéal pour découvrir Clisson et son château perché en haut de la colline.
Hellfest 2008
Today Is the Day attise la foule de la Discovery stage avec son noise-core sulfureux, salves de guitares, déluges de saturation, le trio américain donne tout ce qu'il a à une foule qui en redemande, Steve Austin balancera même sa guitare explosée au milieu de la fosse qui se jette dessus. Petit break rapide après Today Is the Day, Anathema joue sur la Second Stage avec un set assez peu convaincant. Porcupine Tree se lance alors à l'assaut de la scène principale. Métal progressif dans toute son ampleur, un guitariste de moins sur scène, Steve Wilson donne au groupe toute sa prestance. 19h et de trop nombreuses années depuis leur dernier album, une reformation difficile et presque mythique, il s'agit bien sûr de Treponem Pal, le groupe s'empare littéralement de cette tente devenue désormais un peu trop étroite, déluge hardcore, trombes industrielles, le Treponem Pal version 2008 à perdu un peu de sa fraîcheur, mais pas du tout de son efficacité, "Hardcore Massive Soldier" fait trembler tout la tente, simple et bigrement efficace, le guerrier hardcore prouve que la nouvelle cuvée de Treponem Pal n'a pas de plomb dans l'aile, un mélange pimenté de titres de Higher et Weird Machine qui n'augure que du bon pour cette journée décidement sous le signe de l'indus.
Quelques albums décevants, un nouveau line-up où le mascara semble primer sur les archets, l'accueil d'Apocalyptica sur la Main Stage est quelque peu mitigé, le public ne sachant pas trop à quoi s'attendre. Apocalyptica joue alors la carte de la facilité, misant sur les reprises devant un public déjà conquis d'avance à elles, les finlandais sont là pour le show, pas pour présenter leur album, que du reste personne n'écoute, un petit "Refuse, Resist" de Sepultura de derrière les fagots pour mettre tout le monde dans l'ambiance et c'est parti. "Harvester of sorrow", "Seek and Destroy", Apocalyptica utilise son fond de catalogue estampillé Metallica devant un public qui adhère en masse. Max Lilja, le "quatrième" membre d'Apocalyptica, en renfort pour les lives du groupe, se trouve sur la gauche de la scène et assure la cohésion du son du groupe, quand les autres font les guignols sur scène, Max reste assis et s'escrime sur son violoncelle jouant un bon pourcentage des parties lead, ainsi que les contrechants. Quant à lui, Eicca Toppinen se fait également plus sage, laissant les strass de côté. Déjà l'heure des rappel et Apocalyptica lache comme une bombe un explosif "In the Hall of the Moutain King" adapté du morceau d'Edvard Grieg, puis surtout un "Enter sandman" corrosif. Plus tard dans la soirée Gammaray s'essayera à la même reprise d'Edvard Grieg mais avec un résultat pour le moins assez piteux.
Retour aux synthétiseurs et autres samples pour un concert où certains ont tout donné, Punish Yourself veut tout prouver au public ce soir, cyber-punk metal-indus, les mecs en fluos sont là pour se mettre minables. Un show cyber-burlesque, un son corrosif, fini les T-shirts noirs ennuyants et conformistes de la journée, le public les attends de pied fermes, certains depuis quelques heures aux premiers rangs, ayant enduré les black-métalleux de Watain. Vive les couleurs fluos qui illuminent la tente sous les lumières noires, Punish Yourself explose dans tout les sens, sue sang, eau et peinture, un show magistral, intense, une communion avec le public présent, une sorte d'expérience interdite ou de transe sectariste. Vx en veut tellement qu'il se jette dans la foule dans un slam un peu risqué, et là c'est le drame, cinq côtes cassées et c'est un VX grimaçant de douleur, soutenu par deux videurs, qui sort de scène. Pas de répis pour l'indus, quand Ministry commence sur la scène secondaire dans 10 minutes, une translation rapide pour découvrir un scène où le groupe va se trouver derrière des grilles de plusieurs mètres de haut. Ministry joue donc derrière une grille... Sûrement pour protéger la foule de leur métal-indus abrasif. Psalm 69: The Way to Succeed and the Way to Suck Eggs, Rio Grande blood, The last sucker, Ministry écume ses meilleurs albums avec férocité et rage. En arrière-plan c'est un déluge d'images, tout y passe, surtout G.W. Bush, Al Jourgensen la bête noire de Bush s'en donne à coeur joie.
Tête d'affiche sur le dernier créneau horaire de la scène principale, Cavalera Conspiracy est un peu le Sepultura nouvelle génération. Mêmes titres, même fougue, mais un nouveau nom, un bon petit coup de marketing pour Max Cavalera. Ce Cavalera Conspiracy est un retour aux sources, titres incendiaires, déluge de saturation, et des titres de Sepultura qui passent comme une lettre à la poste, "Roots, bloody roots", "Propaganda", Clisson se retrouve à feu et à sang en un rien de temps, avec en prime, une petite averse pour rafraichir tout le monde.
Dimanche 22 Juin
Hellfest 2008 : Grum Lee
Alors que le programme du samedi ne devenait intéressant qu'à une heure avancée de l'après-midi, ce dimanche est un vrai marathon de décibels. Début à 12h30 avec Between The Buried And Me, fin avec Envy qui termine son set à 2h du matin, bref la journée fût longue et éreintante mais satisfaisante. Off-site, Grum Lee se produit au Kristy's, c'est toujours hilare et bon enfant. Le groupe écumant des titres de Iron Maiden ou Judas Priest, entre "Violer la loi" et les solos vaguement chantonnés, l'ambiance comme le temps est au beau fixe. Regarder Grum Lee sur la place Saint-Jacques est aussi une bonne excuse pour profiter de la formule "Spécial Hellfest" de la boulangerie d'en face, un imbattable 5€ pour un sandwich-croissant-boisson...
Un set un peu en demi-teinte pour Between The Buried And Me, qui pourtant se démène avec vigueur, entre death et métal progressif, le quintet démarre cependant bien la journée. Remplaçant au pied levé les suédois de Soilwork, c'est avec détermination qu'Eths joue sur la scène principale, un set dur, avec un impact certain, mais auquel le public est difficilement réceptif, moins appréciateur du néo-métal des marseillais que le public habituel du groupe.
La bonne surprise de cette après-midi, c'est les excellents Year Of No Light, post-hardcore/sludge dans toute sa splendeur, rythmique monstrueuse, riffs envoûtants, une alchimie qui rappelle un peu Isis mais made-in-france, c'est du très bon. Le groupe parcourt son album Nord avec concentration et attention. Le public découvrira également un peu plus tard les finlandais de Ghost Brigade, qui dit finlandais dit forcément métal extrême, donc il va de soit que le post-hardcore des finlandais en soit parsemé.
Concert très attendu, The Dillinger Escape Plan se prépare à jouer une set-list bétonnée et monstrueuse, une grosse partie des titres entraînant de Ire Works ou de Miss Machine y passent, "Black bubblegum", "Setting fire to sleeping giants", "Milk Lizard", "Dead as History", l'excellent "Nong Eye gong", ou encore les brûlots sauvages "Panasonic youth", "Fix your face", "Lurch", un vrai feu d'artifice hardcore. Les Dillinger Escape Plan sont intenables sur scène comme à leur habitude, un guitariste qui saute sur les amplis, un chanteur aussi rapide que son ombre, un concert grandiose dans son ensemble.
Juste après The Dillinger Escape Plan, Meshuggah propulse ses riffs envoûtants et ses rythmiques complexes sur la scène principale, mélangeant allègrement des titres d'ObZen et de Catch Thirtythr33, un set dense et compact, c'est du lourd, du très lourd que Meshuggah développe.
Moins complexe et moins technique, The Ocean offre un set un peu décevant sur la Discovery Stage, des titres un peu insipides, que l'on a vraisemblablement entendu déjà quelque part, le Precambrian des allemands ne manque pas de pêche mais se noie dans un océan de clones... Trop de post-hardcore tue le post-hardcore.
Encore un poids-lourd pour cette après-midi saturée, Opeth prend place sur la mainstage, un concert délicat et parfait, voir même un peu trop parfait, Ghost reveries et Watershed coulent à la perfection, "Reverie - Harlequin forest" ravi le public, toujours à la limite du bon goût Mikael Akerfeldt arborre un T-shirt Scorpions, on ne peut plus à l'opposé de la musique d'Opeth. Les suédois offre un set carré qui comble le public.
Hellfest 2008 : NoFX et sa bannière
Toujours sur la scène principale, c'est aux punks de NoFX de s'occuper de ce public forcément très métal, dans l'humour et la bonne humeur, NoFX enchaîne titres anthologiques et les bonnes blagues de Fat Mike, -"Et vous avez vu notre drapeau derrière nous (NdR: Pointant un carton de 30cm de large) ? C'est le drapeau le plus cher du festival"-, ou encore -"On est dans un festival de black métal, regarde même ma serviette de toilette est noire !"-, et toujours balançant des blagues sur les stéréotypes, -"Notre batteur c'est le seul du fest à ne pas avoir de double-pédale !" puis d'enchaîner sur une démonstration de blast-beat avec une seule pédale. Bref même le public pas forcément amateur de NoFX est resté pour écouter leurs blagues et leurs titres bonnards.
Le Hellfest enchaîne alors avec At The Gates, Shai Hulud, les mythiques Motörhead et le hardcore mélodique de Comeback Kid.
Une courte pause avant d'enchaîner la fin de soirée, Morbid Angel a quelque difficultés sur la scène secondaire à fixer sa double (triple ?) pédale, et après quinze minutes le groupe est près pour une heure de blast-beat et de double-pédale, constituante principale, sinon unique de leur musique. Cult Of Luna débarque enfin sous cette tente prise d'assaut. De plus en plus assagit, instrumentalement parlant, Cult Of Luna livre un set sage et presque introspectif, des lights sobres et discrètes, set intense mais un peu édulcoré, version light d'un Cult Of Luna des années précédentes, Somewhere along the highway étant moins intense et prenant que Salvation. Planté sous la tente, pas la peine de changer de scène pour apprécier le set des japonais d'Envy. Plongé dans un pénombre relative, un peu de bleu ici ou là, Envy livre un set comme un son habitude, avec humilité et dévotion, le screamo d'Envy rassemble un noyau dur de fan, concurrencé par Slayer sur la scène principale, Abyssal et All the footprints you've ever left and the fear expected ahead explosent avec fureur. "South of Heaven" résonne au loin lorsqu'il est temps de regagner le parking...
- Clisson sans Hellfest (295 hits)
- Paplar (243 hits)
- Photos Hellfest Flickr (540 hits)
Merci au Hellfest et à l'orga, à la ville de Clisson et à la maison du Muscadet...
Bonjour à Kath, Sonic et Unabated, Bacterie de Metalorgie, aux p'tit suisses de Kruger, à Biquet et ses lights, au Tsunami bus.
Photos : Keipoth et Pooly. Due aux conditions imposées aux photographes, aucune photo exploitable des prestations des groupes ne se trouve sur cette review.
Re: / Hellfest 2008
Terrier : DTC
--
http://www.w-fenec.org/
http://www.w-fenec.org/~aureliO/
http://theaurelio.blogspot.com/