Dour, mon amour. Le slogan est connu des habitués, mais son sens prend toujours plus de poids au fil des années. 2015 est celle des records, c'est à peine croyable lorsque les chiffres apparaissent devant nos yeux : 5 jours, 270 artistes, 8 scènes pour une fréquentation exceptionnelle de 228 000 festivaliers en cette 27ème édition. Une édition pas dégueulasse du tout dont le duo magique Cactus/Ted vous en relate toutes ses festivités.
Dour 2015 : Krokodil
Jour 1 - MERCREDI 15 JUILLET
Le premier jour, soit mercredi et non jeudi comme à l'accoutumée, c'est déjà 35 000 campeurs qui ont plantés leurs tentes. Quelque part, on s'en doutait au vu de l'attente interminable dans les bouchons avant d'arriver à l'entrée de la plaine de la machine à feu. La motivation est au maximum, et il y en faut car nous ne sommes pas au bout de nos peines : on se confronte quelques heures plus tard à une longue et lente queue devant l'accès du festival, puis, une fois rentrés avec nos pass, on fait face à un camping quasi complet, obligé de trainer nos fesses (et nos bagages) au bout du camping D.
Résultat des comptes, nous arrivons à 23h sur le site du festival alors que débute le show du londonien masqué SBTRKT. N'ayant pas compris l'engouement autour de cet artiste électronique depuis quelques années, on reste toujours incrédule face à ce show aux ambiances lumineuses agréables mais qui ne décollera jamais. La faute à des vocalises qui desservent le propos instrumental déjà pas très excitant au départ, comme ce chanteur rappelant par moment Youssou N'Dour... Bon, OK, celle-là, elle était facile. S'en suit le truc qui va nous motiver à repartir fissa à notre campement : 2 Many DJ's. Les deux frangins Dewaele, membre de Soulwax, présentent un DJ set rythmé de mash-ups plus ou moins "grand public" mais pas assez subtil pour nous emporter. Même lorsque retentit "Girls" des Beastie Boys, cela ne permet pas de remonter le niveau d'un set qui peinera à convaincre. Même l'accueil du public semble tiède. Décidément, on en est certain, les deux quadras auraient pu largement se faire détrôner par la mère de Cactus aux platines. Et on ne vous permet pas de douter des goûts musicaux de la mère de Cactus.
dour 2015 orange goblin
Jour 2 - JEUDI 16 JUILLET
Première "vraie" journée de cette édition. On se lève au son des "Bon Dour !", accent asiatique oblige, de nos voisins de campement. On retrouvera cette pauvre blague tout au long de notre séjour en Belgique, sans parler du fameux "Dourrreeeeuh !", marque emblématique du festival qui l'utilisera d'ailleurs pour sa com' (panneaux, teeshs...). Notez quand même que ce cri de ralliement sempiternellement exhibé à toutes les sauces deviendra assez vite rébarbatif à la longue, surtout pendant cinq jours.
On débute la journée en passant devant Soviet Suprem, le nouveau groupe d' R.Wan de Java et de Toma de La Caravane Passe, confirmant notre impression sur ce rap balkanique comique, à savoir que ça ne nous touche pas du tout. La scène chanson franco-française n'est pas souvent du pain béni, ça se saurait. A éviter donc, sauf si on se perd sur le site ou qu'il n'y a rien à côté. Sauf qu'à Dour, il y a toujours plein de choses à voir. Trop de choses à voir.
Et cela nous amène aux fameux dilemmes, aux choix parfois cornéliens à faire. On a décidé volontairement cette année de ne pas courir comme des fous de scène en scène mais plutôt d'apprécier du mieux qu'on pouvait chaque univers que proposaient les artistes. En ce sens, nous avons pas mal squatté la Cannibal Stage (la scène relevée en décibels rock voire electro) en ce jeudi pour découvrir Krokodil, du hardcore velu comptant dans ses membres des gars de Gallows, Sikth, Cry For Silence, Hexes. Un univers qu'on connaît bien, pas surprenant mais plaisant et énergique pour débuter la journée. Que dire d'Orange Goblin si ce n'est qu'ils ont déroulé leur stoner rustre avec une certaine maîtrise. Jouissif. Mais pas trop longtemps. Dans le même pedigree, Blue Pills nous a agréablement plongé dans un rock bluesy 70's avec une rage vocale émanant de Miss Elin Larsson, annoncée par certains comme la nouvelle Janis Joplin. Ils n'en étaient pas loin ! Juste avant cela, on est allé découvrir l'univers psych-funk d'Unknown Mortal Orchestra. Nos oreilles répondent positivement aux couleurs et aux mélodies proposées par le groupe. Une appréciation qui est toutefois à confirmer hors du rush qui fait face à nous à ce moment précis de la journée.
Histoire de se rincer les oreilles de tous ces riffs endiablés, nous partons voir l'instant funk-soul habituel de Dour. Après Charles Bradley il y a quelques années, c'est au tour d'un autre descendant musical de James Brown de prendre le relais avec Lee Fields & The Expressions. Sensualité cuivrée et énergie avec sueur incluse étaient donc prévues au programme en cette journée ensoleillée. Un show propre et respectable qui s'avère être un must pour serrer de la gueuse à Dour, quoique bien trop court. Retour à la Cannibal Stage pour ce qui reste l'un des meilleurs moments de la journée, à savoir le concert du trio A Place To Bury Strangers, venu défendre son dernier album Transfixiation. Son rock post-punk-shoegaze saturé, sombre et puissant est un bouillon sonore sensationnel qui frise le mur du son et percute le thorax. En terme d'impact sonore, c'est un peu notre Neurosis de 2011 en quelque sorte, même si le style est totalement différent. Et quand le groupe finit son set dans le public, tu te dis que c'est quand même la grosse classe.
Changement de décor sous la Petite Maison Dans La Prairie avec le syrien Omar Souleyman, adepte d'une techno orientale tellement kitch et monotone qu'on en devient assez vite amusé (ou pas, c'est selon). Cette prestation reste hallucinante tant ce style musicale est en marge avec le reste de la programmation. C'est ce qu'on appelle les joies de Dour ! Malheureusement, le tant attendu Squarepusher ne nous a pas beaucoup vus, un petit quart d'heure tout au plus. Car entre les passages en presse, les obligations diverses et les fameux dilemmes, il est assez difficile de tout voir. Surtout quand passe un MC-Hero quasiment en même temps et qu'on ne veut vraiment pas le louper du tout, genre "premier rang". Le britannique touche à tout nous laisse donc un souvenir périssable avec du bon et du moins bon. A revoir. A revoir aussi la prestation du fameux MC-Hero qu'est le mythique KRS-One. Une tuerie ! Il est difficile de rendre un hommage correcte à cet acteur majeur de la scène "rap conscient" tant sa prestation a été généreuse, ponctuée de quelques moments forts et de l'approbation 'finger in ze nose' du public qui montera sur scène à la fin du show. Avec œuf corse un "Sound of the police" d'anthologie. La Boombox is "on fire". Un des grands moments de Dour 2015.
Cette deuxième journée a été "dour dour" et nous laisse un peu KO, la chaleur et la marche y sont pour beaucoup. Nous vaguons et flânons sur quelques scènes avant de partir nous reposer car le vendredi s'annonce géantissime, avec quelques trucs immanquables.
On a loupé : Igorrr, Solstafir, Kvelertak, Electric Wizard, Modeselektor, Mark Ronson.
dour 2015 it it anita
Jour 3 - VENDREDI 17 JUILLET
Ce jour débute par un passage hasardeux devant la tente de la Petite Maison Dans La Prairie, attirés par la prestation tout en finesse du trio electro bruxellois Vuurwerk. C'est onirique, parfait pour un réveil en douceur surtout que la suite du programme fait place à des phénomènes électriques.
Les Liégeois de IT IT Anita, malgré un second guitariste diminué, vont délivrer un set noise-rock inspiré et vivant. On savait que le groupe était très bon sur disque, c'est aussi le cas en live et les présents au Labo ne le regretteront pas. Une confirmation pour ceux les connaissant déjà, probablement une excellente découverte pour les autres.
Vos deux serviteurs étant très fan du rappeur versaillais Fuzati, inutile de dire que nous étions impatient d'assister à ce show anniversaire de l'album le plus marquant du Klub Des Loosers, Vive la vie. Et le flowman accompagné de musiciens délivrera un excellent show. Si les disques se révèlent souvent purement "strictly hip-hop, voir un peu plus...", en live, c'est tout l'éclectisme de celui qui dit ne plus écouter de rap depuis quelques-années qui émerge. Les érudits de la plume numérique utiliseraient l'expression "syncrétisme de bon aloi" pour ces morceaux subtilement et intelligemment réarrangés pour l'occasion. Moment fort : La Boombox qui scande "Baiser ! baiser ! baiser ! Ouh ! Ouh !".
C'est toujours un plaisir non dissimulé de retrouver nos Lofofora sur scène. Les Parisiens nous ont offert sur un plateau un show comme il ont l'habitude de nous en concocter : une énergie contagieuse pleine de sincérité avec la grande gueule de Reuno en sus, qui n'hésite pas à lancer quelques blagues au public quand bon lui semble. On les a retrouvés par la suite en presse pour une interview collective pleine de décontraction et de rigolade. Lofo, quoi !
Même si nous n'avons pas pu nous délecter de tout leur show, problème de planning oblige, Deerhoof garde un standing de haute qualité sur les planches. Son batteur, Greg Saunier, est toujours un atout considérable pour faire pulser cette machine expé-noise-rock et la voix de Satumi embellit à merveille ce package faussement pop abasourdissant de sa douceur et de sa cocasserie.
Moment drôle de la journée : alors qu'on pensait avoir l'excellente Chelsea Wolfe face à nous sous la Jupiler Dance Hall, on se rend compte en partant qu'il s'agit en fait de Zola Jesus ! L'américaine nous lâche une prestation relativement mollassonne, une electro-pop mélodique mais lassante malgré la jolie voix qui l'habille. Le charisme n'est pas présent et la nana peine à convaincre. Dommage. Que dire du live de Tony Allen Review, exclu mondiale, si ce n'est que la musique n'était pas bien marquante, plate et easy-listening, malgré la présence d'Oxmo Puccino, rappeur qui était acclamé par la critique il y a quelques années. Ah oui, et le père Tony est pote avec un certain Damon Albarn (ils ont collaboré ensemble sur le tout aussi plat projet The Good, The Bad & The Queen...) qui est venu lui faire un coucou pour lui souhaiter bon anniversaire, le chanteur de Blur participant à deux titres pour l'occasion, certainement l'un des événements majeurs et le plus attendu du festival... On aurait aimé beaucoup plus mais ce cher Damon avait d'autres obligations le soir-même au Portugal. Mine de rien, c'est pratique un jet privé.
Sunn O))) était l'une de nos attentes, une expérience cosmique à ne pas rater selon certains. Ce fut un fiasco, un gros foutage de gueule. En une demi-heure (on a réussi à tenir jusque-là...), il s'est produit grosso merdo la résonance d'une seule et même note fragile et plaintive par sa lancinante basse. Une mélasse sonore dont on ressort plein de questionnements, est-ce que le drone c'est mieux en live ou sur disque ? Est-ce qu'il faut prendre un stupéfiant pour faire passer la pilule ? Cela nous conforte à l'idée d'aller oublier ça devant un truc tout aussi extrême pour nos oreilles : du rap game avec Kaaris. Quitte à le faire, hein, autant être jusqu'au-boutiste. Le mec au corps musculeux de Sevran n'en avait déjà pas assez de la canicule de la journée qu'il en remet une couche et brûle, par ses punchlines assassines, la Boombox qui porte bien son nom pour le coup. Conquis ? Pas surpris, en tout cas. On connaît IZI les codes de ce milieu mais ce qu'on savait moins, c'est que le rappeur a pas mal fans en Belgique.
On est toujours un peu perplexe concernant un live de Fear Factory. Faut dire que la formation de cyber-métal a bien bougé, ce qui fait qu'on ne sait plus vraiment qui sera devant nous à chaque fois qu'ils jouent. On sait juste qu'ils vont sortir Genexus. C'est finalement deux titres qui sortiront du show ("Photomech", "Soul hacker"), assez peu pour en avoir un aperçu. Burton a toujours un peu de mal à tenir la justesse de ses chants clairs. Set list de festival type avec majoritairement des vieux morceaux pour faire plaisir à tous.
De mémoire, cela devait bien faire 3-4 ans que les Landais de Gojira n'avaient pas fait de passage à Dour. Ils offriront un show comme d'habitude très habité, une set-list variée et puissante qui a ravi les nombreux présents. Après cette rasade de sons globalement agressifs, on profite de l'électro planant de Kid Francescoli pour se remettre de nos émotions. En plus, la blonde qui chante est très jolie, sa voix doucereuse et timide passe nickel sur l'instru. Non, franchement, ce couple marseillais nous a fait du bien. Contempler sereinement la mélodique drum & bass de DJ Fresh sur la Last Arena après une journée aussi chaude et éprouvante, c'est. chaud ! Dans tous les sens du terme. Son set part un peu dans tous les sens avec son MC, s'en est trop, nous nous éclipsons en pensant déjà à demain et en cochant quelques troubadours à ne pas louper.
On a loupé : C2C, The Wombats, Joy Wellboy, Pendulum (DJ Set), Danny Brown, Cannibal Ox, CocoRosie, Anti-Flag, The Black Dahlia Murder, Dope D.O.D, Nina Kraviz, Great Mountain Fire.
dour 2015 sunno
Jour 4 - SAMEDI 18 JUILLET
C'est samedi, le début du week-end, les premiers signes de fatigue commencent sérieusement à se faire sentir dans tout le corps. Les festivaliers les plus téméraires sont devant la révélation hardcore Deez Nuts. Enfin, "révélation", pas tant que ça en fait. Les Australiens pratiquent ce qu'une partie de la scène NYHC faisant dans les 90's, soit une musique métal-punk hargneuse teintée de hip-hop. Gros riffs et énergie sont au programme, les fans sont au taquet. Changement de décor avec un groupe qu'on avait déjà vu à Dour en 2013 : BRNS. Le quatuor belge reste irrésistible sur les planches quand il dévoile son accrocheuse formule sonore : une pop-rock alambiquée, aérienne et expérimentale. On retiendra ce magique "My head is into you" qui nous a fait le plein sensationnel. A ne pas rater s'ils passent près de chez vous.
On est passé devant le vétéran Horace Andy en formule reggae. On le préfère dans ses collaborations, plus ambitieuses artistiquement, tel que l'évident Mezzanine de Massive Attack. Cependant, il n'a pas démérité du tout, Sleepy reste Sleepy. Et comme on dit dans les milieux autorisés : "Grâce à Sleepy, j'ai trouvé une totale liberté d'esprit vers un nouvel âge réminiscent". Acid Baby Jesus était noté en priorité sur notre liste, longtemps à l'avance. Et pour cause, à l'image de leurs quelques disques, les Grecs nous livrent un set totalement psyché et sombrement décomplexé. Forcément, on adore. Direction la Cannibal Stage : trois ans après leur première inoubliable venue, les Suicide Silence font une harangue à la foule, l'invite à se lâcher sous les décibels métal du combo. Ca reste carré mais d'un niveau en-dessous par rapport à la première fois, effet de surprise en moins. Même remarque plus tard pour Agnostic Front dans un autre registre. Notez que c'était d'ailleurs foncièrement le contraire pour Terror, toujours sur la même scène quelques instants après. On les avait déjà vus à maintes reprises dans le passé, mais sur ce show-là, les ricains ont été impériaux.
Entre temps, Mars Red Sky proposait un stoner-rock psyché plaisant sous le Labo : la voix de Julien, très éthéré et atypique pour le genre, ajoute un supplément de singularité à une formule qui a déjà fait ses preuves. Les titres s'enchaînent sans déplaisir et lassitude, ce qui n'est déjà pas si mal. Le groupe du guitariste des Libertines, Carl Barât And The Jackals a fait plutôt bonne impression avec son rock typique aux forts accents british. Les compositions, fleur bleue par-ci, frondeuses par-là, n'ont pas toujours très bonnes, mais on ne va non plus apprendre à un anglais à faire du rock. On se dirige sous le Labo pour apprécier la prestation de Laetitia Sheriff, et autant vous dire que c'est du tout bon. Quelle volupté dans son rock qui me rappelle à la fois celui de Shannon Wright et Serena Maneesh. Un très bon moment qui sera encore plus intense avec le Parisien Jessica93. La force tranquille, c'est seul au commande qu'il égrène d'ondes darkwave la populace venue le voir. La sauce a pris indéniablement, envoûtant davantage les premiers rangs. Son show impeccable et implacable nous laisse l'impression d'un type qui n'a plus rien à prouver en live à l'heure actuelle. "Vivement le prochain album !".
Sur l'affiche, c'était la "star" du samedi. Lauryn Hill l'a joué : arrivée une bonne demi-heure de retard, relation froide avec le public de Dour après l'avoir confondu avec celui de Bruxelles, show qui met du temps à se mettre en place. C'en est trop ! Le festivalier de la plaine de la machine à feu n'a pas de temps à perdre avec ces conneries, on ratera visiblement "la meilleure partie" du show. Tant pis pour elle, Autechre joue en même temps, et ça c'est immanquable vu le peu de concert qu'ils font. Rob Brown et Sean Booth nous plongent dans un noir profond pour mieux nous immerger dans leur électro IDM expérimentale et déshumanisée. Un final parfait avant de penser à partir dans les bras de Morphée. Une réflexion assez fugace dès lors que la pluie commence à bien tomber sur Dour.
On a loupé : Defeater, Hatebreed, Roni Size, The Drums, The Bloody Beetroots (DJ Set).
dour 2015 electric wizard
Jour 5 - DIMANCHE 19 JUILLET
C'est souvent avec tristesse que l'on aborde la dernière étape de notre séjour à Dour. Ce fut tellement intense que le dimanche rime avec indolence, tout en essayant quand même de profiter au maximum du temps qu'il nous reste et des festivités qui s'opèrent à l'intérieur. Pourtant le début fait mal aux oreilles. Nothing But Thieves fait fuir tant la voix aiguë et mielleuse de son chanteur est insupportable, et puis leur musique l'est tout autant. Mais pourquoi donc ces Anglais étaient-ils programmés ? Et sur la Cannibal Stage de surcroit ? On passe ensuite à la nouvelle scène du Labo pour voir Spagguetta Orghasmmond, un groupe parodique belge œuvrant dans le ridicule assumé : musique kitchissime à souhait genre Frédéric François/Franck Mickaël mais version Jupiler et moustache foisonnante, costumes en adéquation tout droit sorti des placards de mamie mais une mamie qui a pris ses habitudes vestimentaires dans les clips de Village People et certains films de John Travolta... Rigolo deux titres et on est passé à autre chose...
Le niveau est vite rattrapé par la formation qui suit, à savoir Raketkanon qui développe un univers propre confectionné sur disque par Sir Albini. Belle publicité pour les Gantois qui méritent que leur math-noise-rock bidouillée de bout en bout soient largement diffusé à la populace. Retour sur terre en passant devant le set de Tiken Jah Fakoly, présent sur la Last Arena avec ses nombreux musiciens. L'ivoirien est venu présenter son Dernier appel, un reggae pacificateur plein de conscience sociale et politique. Pas franchement fan depuis de nombreuses années, nous constatons simplement que Tiken a fait le job, comme d'habitude, devant un parterre de fans inconditionnels. Au final, ça passe toujours bien le reggae en festival en buvant un bon Jack.
Ce qui a suivi est resté dans les bonnes mémoires de ce Dour 2015. GoGo Penguin ne se fait pas prier pour faire jaillir son arsenal jazzy avec une pointe électro pour le rendre, disons, un peu plus moderne. C'est très mélancolique, le soleil a du mal à sortir, pas de doute, on est vraiment dimanche. Et quoi de mieux que du post-punk pour se remettre de tout ça ? Eagulls fait forte impression avec son post-punk à la fois mélancolique et rageur. Le petit charisme du chanteur, ressemblant vaguement à un Macaulay Culkin version perfide Albion, y est pour beaucoup. La qualité de la musique entre bruine et lumière aussi hein...
On avait entendu beaucoup de bien de Rejjie Snow (après enquête, aucun lien de parenté avec Jon Snow... désolé...), le petit prodige hip-hop made in Ireland. Et sa prestation ne fera pas mentir sa réputation à la limite de la hype : le bonhomme se démène comme un beau diable pour défendre sa version des faits. Le public de la Boombox est ravi, nous aussi.
Encore une belle découverte électro avec Débruit. Le Français, roi de l'échantillonnage, nous fait voyager à travers ses trouvailles et son tricotage sonore, le tout savamment rythmée. Ça plaît au public qui semble avoir lui aussi trouver chaussure à son pied en ce dimanche après-midi qui file à une vitesse folle. Nous avions vu And So I Watch You From Afar au même endroit il y a deux ans. Cette fois-ci, le quatuor de Belfast compte un album de plus à son actif avec le récent Heirs. Pas de changements majeurs entre les deux shows, c'est toujours aussi puissant, dansant mais également hypnagogique entre deux balafres données par ses rythmiques math-rock. Après, faut aimer le style, c'est comme tout.
Les têtes d'affiche ne sont souvent pas ce qu'il y a de plus intéressant à Dour et ce sera le cas avec Santigold, La prestation ridicule de la soirée. Musique sans intérêt et interprétation au même niveau. Les autorités douriennes invoqueront même un soupçon de playback pour seconder la pseudo-diva, c'est un comble . Et la chanteuse arbore un nœud papillon jaune tout aussi ridicule. A jeter.
Snoop Dogg à Dour ? Ca peut paraître bizarre quand on sait que le rappeur préfère en général la proximité des petites salles et des aftershows. C'est d'ailleurs là qu'il excelle l'ayant vu par le passé. Devant 20 000 personnes présentes devant la scène de la Last Arena, le Doggfather a joué 40 minutes au lieu d'1h15. Mauvais point, d'autant plus qu'il quitte la scène au milieu d'un morceau. Et la prestation ? Le minimum syndical avec un son qui n'arrive pas vraiment jusqu'à nos oreilles. Pas une escroquerie, mais presque malgré quelques oldies et des reprises de classiques (dont le "I love rock n' roll de Joan Jett façon playback, youhou...). Ouais, si, une escroquerie en fait. La fin de festival rêvée, on l'a eu : contempler Jon Hopkins derrière ses machines pour un voyage électro interstellaire avec un super travail vidéo dont le passage du clip de la magistrale "Open eye signal". Un show béton tout en maîtrise propice à l'introspection. Que demande le peuple ?
On a loupé : Chinese Man, Al'Tarba, Infected Mushroom, Clap! Clap!.
CONCLUSION
Dour c'est (pêle-mêle) :
- Dourrreeeeuh ! (T'as beau l'oublier, ça revient assez vite en général)
- de la bière
- de la bière..
- de la bière... (changez de marque s'il vous plait !)
- des pauses bières sur le parking parce que, c'est pas qu'on n'aime pas vos bières, mais bon... Si en fait, on ne les aime pas. Un comble au pays du houblon et des bières de dégustation
- la galère pour retrouver ta bagnole sur le parking, même à deux
- un marathon (à vérifier car j'ai pas pris mon podomètre)
- un soin faciale 100% à la bière parce que la boue, ça rend la marche à pied avec un verre dans la main sacrément périlleuse. Soin visage à l'efficacité éprouvée par Ted.
- du Jack (quand même, merde, on est à Dour)
- des serveuses méga canons triées sur le volet (dédicace à celles du stand JD et celui de Jupi en presse)
- des rencontres fortuites, intéressantes ou non
- essayer parfois de communiquer avec des gens dans des langues incompréhensibles et indéfinies
- des retrouvailles (un coucou spécial aux Lillois)
- un gars de la sécu qui porte un t-shirt "quenelle épaulée" -> Antisémite !
- des Flamandes...
- des Flamands qui font semblant de ne pas comprendre le français
- de la chaleur (un peu partout)
- donc plein de transpiration (un peu partout)
- de la boue (ben oui, quand même, c'est normal après 4 jours de canicule)
- des calemdours
- "Tu cherches quelque chose ?"
- "T'aurais pas une clope steup ?"
- "T'aurais pas vu ma copine ? Elle est blonde aux yeux bleues."
- plein de courage pour aller aux toilettes (mais vraiment plein)
- un transit intestinal capricieux
- une passerelle d'accès qu'on aimerait ne plus jamais prendre
- des sardines de tente qui ne se plantent pas
- des huttes de sudation le matin (mais sans le rituel spirituel)
- des vivres qui partent en couilles au bout de deux jours
- du bricolage
- des inventions stupéfiantes comme le lance-pierre géant mais avec des chaussures à la place
- payer une douche 2 euros et attendre une heure
- de la sauce aux frites
- de l'eau du robinet qui t'oblige de manière foudroyante à retourner aux toilettes
- des glissades inattendues, tu sais, juste après la fin des planches en sortant d'une tente...
- ne pas trouver de cure-dent chez les "restaurateurs"
- de l'herbe (du gazon quoi, pour se poser dessus) qui sent fort par moment
- des siestes pas prévues du tout, mais pas du tout, du tout
- des copains/copines qui ne viennent pas (qu'est-ce que vous foutez bordel !)
- Dourman et l'homme des bois, les habitués qu'on croise à chaque fois
- un dournoi de foot
- "baiser, baiser, baiser, baaaaaaaiiiiiser !"
- une attente pour arriver et une autre pour repartir, genre 3h. Cool !
- des auto-stoppeurs agressifs qui s'agrippent à ta caisse en sortant du festival. Ben ouais, faut bien rentrer bordel !
- surtout de la super musique et de belles découvertes à faire : ceci est un rappel pour ceux qui ne viennent pas pour ça
Tu viens avec nous l'année prochaine ?
Merci à la Dour team pour les photos
Sunno, Electric Wizard et Orange Goblin © Mathieu Drouet
Krokodil © Laurence guenoun
IT IT Anita © Romain S. Donadio