Dour 2013 Quand la W-Fenec team s'organise pour retrouver les festivités de Dour, elle laisse toujours planer cette sensation d'à peu-près et cette part d'inconnu restant comme le moteur de souvenirs impérissables. Eparpillée géographiquement, c'est à coup de rendez-vous plus ou moins fiables qu'un premier groupe tente de se retrouver à Lille, à un peu plus d'une heure du lieu de pèlerinage, pour filer en caisse direction le camping. L'obscurité se profile lorsque la tente, qui est censée nous abriter pendant le séjour belge, se montre récalcitrante. Pas grave, la petite Quechua de Cactus fera l'affaire pour une nuitée. Le lendemain matin, deux voisins Wallons en plein apéro au Get 27, viennent nous prêter main forte pendant que Cactus se tape la première insolation de cette édition. Ca promet. Nous sommes jeudi, généralement une journée relativement calme, parfait pour se mettre petit à petit dans le rythme de cet évènement qui prend quand même pas mal de ressources pour des petits gars comme nous, amateurs de son tous azimuts. C'est parti !


JEUDI 18 JUILLET

Les Belges de Paon inaugurent notre édition 2013 de Dour avec une pop enjôleuse dont les influences liées à leur congénères Alt-J ou Local Natives n'ont pas été volées. Une formation à recommander pour les fans du genre qui, en live, s'en sort plutôt bien. La première prestation vue sur la Last Arena résonnait au son du reggae-dub-ska-rock UK, avec l'accent bien prononcé comme il faut. The Skints, c'est la coolitude énergique assumée dispensé de la méthode roots parfois agaçante, ca envoie notamment grâce à des flows assez dingues par moment ("Rat-a-tat") et ca égaye en plus ! Que demander de plus quand on a pas mieux à voir ? C'est une des sensations de l'été puisqu'ils écument la plupart des grands festivals et ne sont pas encore très (trop ?) connus, les BRNS jouaient en terrain conquis à Dour, leur rock sacrément réfléchi et alambiqué reste accessible et par certains moments peut retourner une foule avec une facilité déconcertante ("Mexico"). Bande son idéale d'une après-midi ensoleillée, les Belges nous ont démontré que leur nom n'était pas démérité ! C'était tout le contraire pour White Denim avec un assemblage d'idées et une association des genres pas toujours pertinent. Lui n'a pas besoin de travailler beaucoup pour démontrer ce qu'il sait faire. Lui, c'est Charles Bradley. Retrouvez notre Charles avec ses Extraordinaires, le Menahan Street Band étant très certainement occupé, ne pouvait pas mieux nous faire plaisir. De la funk-soul comme on aime, le groupe a présenté en grande pompe au public de Dour les titres de son nouvel album, Victim of love. Possédé par les vibrations de sa musique, Charles Bradley a littéralement embrasé la foule lorsque celui-ci, tel un James Brown, s'est tenté à quelques acrobaties plutôt réussies. On rappelle que le gaillard a 65 ans et nous a prouvé une nouvelle fois que la musique conserve ou mieux, fait rajeunir.

Tomahawk (Dour 2013) Tomahawk (Dour 2013) Ceux-là portent bien leur nom, The Horrors. Tenue vestimentaire sombre et trouée, chanteur ne tenant droit, ni sa personne (accrochée au micro), ni ses lignes de chant ("mais c'est leur style"), mais qu'est-ce que nous sommes allé foutre sous la Marquee ? Les Britanniques sont une grosse fausse note dans la programmation, une petite perte de temps pour nous. Ca nous apprendra à suivre quelques critiques élogieuses ... qui sont totalement justifiées pour le supergroupe suivant qui suit. Tomahawk, avec à sa tête Mike Patton (Faith No More, Mr. Bungle), John Stanier (Helmet, Battles), Duane Denison (The Jesus Lizard) et Trevor Dunn (Mr. Bungle, The Melvins Lite) livre un set de big boss en interprétant parfaitement les morceaux les plus marquants (de mémoire : "Mayday", "Rape this day", "Cul de sac"...) de son répertoire. C'est Mike Patton, dans son rôle de chef d'orchestre qui se permet notamment de recadrer John Stanier à plusieurs reprises, qui est le plus impressionnant. Tout cela avec une prestation vocale impeccable et un dialogue avec le public assez drôle ("Salut la Belgique, Plastic Bertrand, Johnny Hallyday, Youhou"). Un set souvent jouissif, sans surprise, mais placé sous le signe de la haute maîtrise. Dans un tout autre genre, Bonobo est un artiste (re)connu par la team, d'abord grâce à son excellent Dial M for monkey puis confirmé par Days to come. Depuis, nous n'avions plus vraiment suivi le bonhomme et c'est basse en main que le DJ anglais a bercé avec brio le public avec son trip-hop jazzy feutré accompagné de la voix suave de Bajka. Belle performance mais difficile de rentrer complètement dedans quand nous enchaînons groupe sur groupe, de styles différents qui plus est. A revoir donc, mais en salle cette fois-ci. Tu vois à peu près ce qu'est la drum & bass anglaise ? Tu connais Roni Size ? Tu peux imaginer un chapiteau archi comble ? Si tu réponds "oui" aux trois questions alors tu regretteras peut-être déjà de ne pas être allé à Dour cette année car les échos reçus et la retransmission sur écran à quelques mètres de là donnait vraiment envie de rentrer sous la grande tente. Pendant le concert du gars de Bristol accompagné de Dynamite, nous étions en train de débattre sur ce qu'était la bonne drum & bass. Tu veux savoir ? Ben, la bonne D&B, le gars il pose son matos et il envoie ses 190 bpm et la mauvaise D&B, ben, le gars il pose son matos et il envoie ses 190 bpm, mais c'est de la mauvaise D&B. Blague à part, l'un des groupes rap de notre adolescence, le Wu-Tang a revu ses classiques à Dour avec une belle palette de titres issus de 36 chambers. De quoi nous rendre heureux même si la prestation des New-Yorkais s'apparente à celle d'un joyeux bordel. Comme dirait Eva Ries, la responsable marketing de leur premier album : "C'est le plus grand groupe de rap du monde et le plus amateur". Un très bon résumé en somme.


VENDREDI 19 JUILLET

Exsonvaldes (Dour 2013) Exsonvaldes (Dour 2013) Le vendredi représente la journée la plus chargée en "groupes potentiellement intéressants à voir". C'est après un réveil tout en chaleur et en sueur que nous rejoignons le site pour faire connaissance avec une formation fraichement constituée, notamment par un Maria Goretti Quartet et un Louis Minus XVI. Unik Ubik nous offre une belle entame de journée avec un set rythmiquement varié et une musique atypique, que nous qualifierons de "noise hypnotique", accompagnée d'un saxo volatile. Il est tôt mais vu le programme de la journée sur la Cannibal Stage, c'est un honneur pour The Black Heart Rebellion d'envoyer son post-hardcore lancinant et tranchant avant les nombreux autres que tu découvriras plus loin dans ce récit... Le collectif belge évite le superflu en mettant le talent de chacun à contribution quelque soit son arme de prédilection. C'est idéal pour se chauffer les oreilles ! Changement d'ambiance avec Exsonvaldes venu présenter en avant-première son nouvel album Lights à un public belge très peu nombreux à les applaudir après le déjeuner. Trop tôt ? Trop chaud ? Les absents ont tort et devront donc attendre jusqu'à l'automne pour les recroiser en Belgique et apprécier leur show avec des titres tout en douceur, entre complicité et intimité qu'ils soient électriques ou acoustiques et chanté en français ou en anglais. Nous avions coché MayBeSheWill sur notre planning sans trop les connaître et nous avons bien fait. Les Anglais ont envoyé un set tonitruant rappelant par moments les excellents 65DaysOfStatic mais ne se résumant pas à être un clone "post rock électro" mais plutôt un groupe mélangeant aussi bien les ambiances instrumentales éthérées à un beau et gros son métallique et des boucles entêtantes. Encore une découverte marquante de cette 25ème édition de Dour. Direction la Last Arena pour aller découvrir Hippocampe Fou, un artiste dont on nous a dit du bien l'année dernière à travers une discussion tournant autour de l'abstract hip-hop français. Un type qui qualifie son rap d'aquatique, certes, on comprend bien l'idée de vouloir se démarquer mais rien de bien nouveau sous le soleil. Le MC beatmaker, accompagné de deux très bons rappeurs dont nous avons déjà oublié les noms, diffuse ses morceaux les uns après les autres tentant tant bien que mal de faire bouger les foules en plein cagnard. Pas évident, mais le Parisien aura réussi à nous mettre dans la tête l'une de ses punchlines du moment : "Nu dans ta douche, j'éternue dans ta bouche". C'est du beau !

Trio déjà connu de nos services notamment lors de leurs élucubrations avec La colonie de vacances (en compagnie de Marvin, Papier Tigre et Pneu...), Electric Electric nous étonne encore avec un live du feu de Dieu, l'un des meilleurs de cette édition, où s'illustre un batteur à l'énergie intarissable. Dans un set qui ne laisse aucun répit aux spectateurs présents dans La petite maison dans la prairie, nous avons reconnu quelques morceaux du génial Discipline. Le pop rock et ensoleillé de Piano Club, groupe dans lequel évolue Anthony d'Hollywood Porn Stars, ferait un carton dans les collèges et radios US. Les Liégeois ont axé leur prestation autour de leur nouvel opus et pas uniquement d'un synthé comme leur patronyme pourrait le laisser croire. C'est sans a priori que nous dirigeons sur la Last Arena pour découvrir La Coka Nostra en version live. La bande "white trash" d'Ill Bill et des deux House of Pain que sont Danny Boy et DJ Lethal ont le son qui détonne, de la rime en pagaille, comme sur CD. Et c'est tout là le problème. Les mecs ne bougent pas ou peu et semblent être à la limite du mode répétition. Est-ce bien raisonnable de traverser l'Atlantique pour ça ? Ce concert aurait eu surement plus d'effet dans des petits clubs, à coup sûr. On prend les mêmes et on recommence ? Deux ans après avoir ravagé la Cannibal, les Skindred reviennent et nous jouent le même tour. A leur show et leurs petites habitudes (notamment la reprise de "Sad but true" de MetallicA), les Anglais balancent quelques nouveaux titres et font asseoir tout le monde pour donner plus de hauteur au jump de la tente toute entière avant de terminer en mode Patrick Sébastien avec une version remasterisée de "On fait tourner les serviettes" option "on fait tourner les TShirts", ça a l'air con comme ça mais un peu de ventilation, ça fait du bien ! Quand on se trouve au milieu d'une programmation intense comme celle de vendredi, il n'est pas évident d'enchaîner les nombreuses scènes de la plaine de l'ex-machine à feu de Dour. Lorsqu'on arrive pour Pelican, cela fait déjà plus de cinq heures qu'on tourne sans cesse. Les pauses s'imposent donc et réservent parfois des moments inattendus comme cette fille qui se tapent quelques gorgées de notre bière sans prévenir et en nous regardant en train de la boire d'un air malin. Bonne joueuse, sans tarder, elle nous en repaye deux en nous mettant en garde sur les dealers de drogues sur le site et sur le camping. Les rencontres fortuites et éphémères sont nombreuses ici mais intenses. Comme quand un type se jette sur toi pour te remercie de porter le même t-shirt que lui. C'est ça aussi Dour, le partage entre festivaliers. Pelican démarre, toute la team les a déjà vus et comme nous aspirons à plus de rythme et d'engouement, nous nous dirigeons rapidement vers Danko Jones. Lui saura mettre l'ambiance, c'est clair.

Danko Jones (Dour 2013) Danko Jones (Dour 2013) Pour ne pas se mettre à dos notre camarade Gui de Champi, nous ne dirons que du bien de Danko Jones. Nul besoin de se forcer car le trio canadien sait occuper la place et investit la grande scène à grands coups de riffs, de sourires et de vannes plus ou moins efficaces (le niveau d'anglais du festivalier moyen ne lui permettant pas de rire à chaque intervention). Pas avare de mots, le chanteur guitariste tape la discute avec les premiers rangs, invite les photographes à rester tout le concert en front stage, nous demande de faire semblant de connaître ses titres. Il a vrai don pour se mettre le public dans la poche entre deux compositions bien dosées en testostérone et mélodies. Danko trouve également le moyen de se faire plaindre de son jetlag. La vie d'artiste, c'est dur m'voyez. S'il y en a un qui ne se prend pas la tête et qui sait mener son public, c'est bien Dan Deacon. Autant nous avons du mal à cerner l'interêt de sa musique sur disque, autant le gentille hype qui entoure le bonhomme à l'allure d'américain moyen révèle peu à peu sa source. Sur une musique rythmiquement généreuse et entrecoupée par d'interminables discours, ce performeur de l'électro-pop endosse le costume d'animateur de colonies de vacances et fait danser la foule. Le Club Med' mais façon rock indé. Probablement cool à suivre dans un état second mais ce n'était pas notre cas. Le concert de Torche qui a suivi se trouve dans les tops de la journée voire du festival. Les ricains alternent titres heavy et morceaux punk avec ferveur. C'est évidemment les passages consacrés à leur sommet discographique, Meanderthal, qui réveilleront à plusieurs reprises un public qui, lançant une série de slam et de pogo, semblait déjà conquis d'avance. Que dire de plus sur Hatebreed en 2013 ? La bande de Jamey Jasta sait foutre le dawa comme il faut et emballer un public d'initiés. Evident tant les Americains sont une valeur sure dans la catégorie Hardcore. Nous les aurions davantage vu sur la Cannibal Stage, plus petite mais la symbiose aurait franchement mieux marché. Pas de surprise donc, un peu monotone même au bout de 5-6 titres, et puis il faut dire que le meilleur du groupe se situe clairement en arrière. Sérieusement, comment résister à un "I will be heard" ou un "Live for this" ?

Torche (Dour 2013) Torche (Dour 2013) Mark Lanegan a semble-t-il pris un coup de vieux. Il arrive voûte avec son groupe sur la scène de la Jupiler, mais son talent demeure totalement intacte. Une heure de show où se suivent morceaux down-tempo à la beauté crépusculaire et des passages un poil plus agressifs comme le fabuleux "Methampetamine blues" issu de Bubblegum. Excellent live, tout comme AmenRa. Il ne faisait pas nuit quand les Belges ont donné leur concert. Résultat : nous avons pu les voir baver sur scène, se démener sang et eau pour taillader leurs instruments et donner des frissons au micro. Nous en oublions les images projetées et, même habitués, nous mangeons, dégustons et en prenons plein la tronche. Le masochisme semble être contagieux car suit le gros bordel bien brouillon de Converge. Bing et rebing, ça tape dans tous les sens, ça saute, ça hurle, ça fight de partout, faites de la place, les hardcoreux de Boston sont là. Et si dans les premiers instants, leur furie ravit, après plusieurs minutes, il faut impérativement souffler et surtout faire souffler le crâne. Les mecs sont à fond, certes, mais leurs amplis aussi et c'est difficilement soutenable. La Cannibale Stage s'aère, pas mal de monde préférant écouter leur prestation depuis l'extérieur pour y survivre. Du côté d'Amon Tobin, c'est un show agressif et calibré pour le dancefloor où l'on peine à retrouver le charisme sonore habituel du Brésilien. Son projet "Two Fingers", présenté ce jour, reste décevant au regard de la discographie exigeante du Monsieur. Curiosité du planning, les Bordelais de JC Satàn devaient défendre leur dernier album, Faraway land, sur la Cannibale stage à minuit et demi, après la terre brulée de Converge. Reste que les musiciens ont fait le boulot, passé quelques titres à prendre leurs marques, et ont conquis nos oreilles avec leur rock-garage bâtard. Une bonne décharge d'énergie salvatrice à cette heure tardive.


SAMEDI 20 JUILLET

C'est avec Sinkane que nous attaquons la seconde moitié du festival. Derrière ce projet se cache un quatuor multiethnique dirigé d'une main de fer par l'americano-soudanais Ahmed Gallab, un batteur de session ayant déjà travaillé avec Caribou, Yeasayer ou encore Of Montreal. Son petit bébé, où il devient guitariste et claviériste pour l'occasion, nous ouvre les portes sur des sonorités exotiques, entre pop funky et afrobeat hypnotisant. Une coolitude assumée contagieuse, quoi de mieux pour commencer cette longue journée ? Rebelote avec We Are Enfant Terrible. Même si nous ne sommes pas forcément client du trio sur disque, force est de constater que le groupe donne beaucoup en live, notamment leur fantasque batteur. Leur pop Game Boy, parée parfois de riff bien noisy, prend alors un tournant franchement pas déplaisant. Et puis, il faut dire aussi que la chanteuse est plutôt mignonne. Un atout pas négligeable en live. Remis de nos émotions, nous nous dirigeons vers la Dub Corner où le crew d'High Tone est venu poser le son en plein-air et en mode Sound System. Eths (Dour 2013) Eths (Dour 2013) C'est dans un petit périmètre que les quatre grosses enceintes entourant le public font littéralement tremblé le sol aux sons des riddims dubby. Très bonne initiative des organisateurs d'avoir posé ce Dub Corner de manière improvisée sur deux jours pour faire vibrer un public d'initiés au dub et consorts. Fans des sixties ? Assurément, les Pale Grey livrent une pop bien plus colorée que le gris pâle annoncé, puisant dans de lointaines influences pour composer une musique sans prise de tête. "Uniformes" vestimentaires, gestuels, gimmicks, constructions, ils assurent un pont entre les origines (The Beatles et pas mal de groupes en "the" de l'époque) et le présent, c'est assez plaisant. Comme c'était notre premier concert d'Eths avec Rachel au chant, nous étions plutôt excités de voir le résultat de ce changement... Et le moins que l'on puisse dire, c'est que nous n'avons pas été déçu ! Alors, on peut se lancer dans toutes les comparaisons du monde mais Rachel n'est pas Candice et Candice n'est pas Rachel, alors nous avons juste profité du show assuré par les Marseillais pour qui la différence la plus notable avec "avant" est certainement le fait de ne jouer qu'avec un seul guitariste. Cela perd un peu en oppression sonore mais les compositions (notamment les "vieilles") sont toujours redoutables d'efficacité !

Lee Scratch Perry est vraiment trop vieux pour ces conneries. A 77 ans, le Jamaïcain ne sait pas (plus ?) chanter. Et ce n'est pas le collectif ERM, qui l'accompagne pour l'occasion, qui changera la donne. La prestation insupportable aux oreilles de cette légende de l'expérimentation Dub & Cie sent brutalement la fin de carrière. Inconnu de nos services, les Gallois de The Joy Formidable excellent dans la formule power-pop formatée. Navrant quand on sait ce qui existe comme bonnes formations dans le genre. Trop peu innovant et assez vite blasant, nous partons nous faire nettoyer les oreilles avec le hardcore de Bleed From Within. Si la formation de Glasgow était venu joué dans un petit festoche ou sur une date classique en salle, on aurait certainement trouvé ça béton, mais là, avec le nombre de combos géniaux qu'on a croisé durant quatre jours, on les aura vite oubliés, c'est dur, mais c'est Dour. Deux ans après une prestation trop peu convaincante ici-même, The Herbaliser remet le couvert mais cette fois avec une nette amélioration. Toujours autant blindé lorsqu'il jouent, les Britanniques ont su mettre le public assez facilement dans leurs poches avec des titres hip-hop jazzy et funky savamment interprétés, peut-être trop même. Parfois à la limite de la récitation de ses morceaux, le groupe s'en sort néanmoins relativement bien et, clou du spectacle, a annoncé au chanteur une belle surprise : la naissance en direct de son bébé. Une séquence émotion rare à Dour. Premier groupe booké pour cet anniversaire, les Mass Hysteria auraient préféré faire leur cinquième passage sur la Cannibale mais déboulent sur la Last Arena pour une heure de furia ! Des nuages de poussière couvrent les premiers rangs durant les moments forts où le pit s'excite, que ce soit pour un double braveheart, pour un circle pit autour des Mass, pour exploser quelques secondes sur des riffs cultes de Slayer ou de MetallicA, pour recevoir Yann ou Nico en slam, pour danser comme les filles montées sur scène, toutes les occasions sont bonnes pour faire la fête avec les Hystériques. Nous avons beau connaître ces sensations par coeur depuis 20 ans, nous prenons toujours autant notre pied. Comment redescendre sur Terre après la Furia ? Se faufiler jusque la tente d'à côté pour écouter Suuns, c'est hypnotique, lancinant et prenant, un bon moment de zen qui suit une grosse débauche d'énergie.

Mass Hysteria - Dour 2013 Mass Hysteria - Dour 2013 Planning serré oblige, nous n'avons pas vu grand-chose de Diiv mais leur pop éthérée puant les années 90 semblait avoir des atouts à revendre. Le combo bruxellois de Length Of Time n'a pas fait dans le détail. Revisitant avec brutalité ses classiques thrash-hardcore, le all-star band belge (avec des membres de Deviate, Out Of Blood et Backstabbers), qui a pris un peu de rides, nous a donné une bonne leçon de métal sur les planches de la Cannibal Stage. Non loin de là, les Ultramagnetic MC's, légendes du hip-hop US co-fondé par Kool Keith, investissent les planches de la Dance Hall. Mises à part de rares exceptions (Public Enemy, De La Soul...), le hip-hop old-school en live, c'est souvent plat et le gang du Bronx ne dérogera pas à cette règle malgré les quelques morceaux mythiques de leur répertoire. C'est avec les titres aux refrains les plus mélodiques que les Comeback Kid ont entamé leur set, histoire de chauffer doucement (mais sûrement) le public. La suite va monter crescendo et taper de plus en plus fort, le côté HardCore de chez HardCore surchauffant un pit pourtant déjà calciné par le soleil et les groupes précédents. Comme nous avions un excellent souvenir de la prestation des Simian Mobile Disco il y a quelques années, nous voulions revivre l'expérience. Arrivé tardivement, il était impossible d'accéder à la tente où le duo opérait, nous avons du nous contenter du son depuis l'extérieur. Entrer dans l'ambiance s'est montré plus que compliqué, dommage ! Rien ne mieux qu'une bonne Leffe bue en loucedé au parking (La Jupi du site étant assez dégueulasse) pour remotiver les troupes et se diriger vers la Last Arena pour aller applaudir une figure du hip-hop US. Les Jurassic 5 en live, c'est l'antithèse du show de branleurs des Wu Tang Clan. Un concert carré, vivant et visuellement agréable où les titres de Quality control et Power in numbers se suivent pour le plus grand plaisir de nos oreilles. Mention spécial pour le très classe "What's golden".

Dernier gros morceau de la journée sur la Cannibale : les vétérans d'Anti-Flag ont fait une démonstration de punk rock ! Et comme pour Skindred, toute la tente s'est mise à headbanger, jumper, pogoter, mosher... Survolté, Chris#2 a donné de sa personne pour mettre le feu, terminant le concert avec Pat Thetic (batteur) dans les premiers rangs et avec beaucoup moins de sécu que pour Mouss ou Yann un peu plus tôt. Leur musique n'est pas la plus inventive qui soit mais leurs discours très engagés et leur dynamisme compensent largement et permettent de passer un très grand moment ! S'il y a bien un show qui nous a complètement retourné le cerveau, c'est bien celui de Venetian Snares. Pourtant, quelques heures avant, après avoir croisé le grand blond canadien en zone presse quelque peu éméché, nous émettions quelques doutes sur la qualité de sa prestation. Bim ! L'artiste le plus prolifique de la scène breakcore nous a fait mentir en délivrant un set intense ininterrompu d'une heure où moult sons se sont enchevêtrés à la vitesse de la lumière. Complètement dément, son show était toutefois réservé aux oreilles les plus averties. Les serveurs de la buvette d'en face s'en souviennent encore. Mais la guerre va continuer de plus belle avec le grand Manu Le Malin qui reprend les rênes juste derrière dans une tente chauffée à bloc. Les beats hardcore font leurs effets, certains flashbacks de rave party refont surface, mais la fatigue accumulée depuis le début nous incite progressivement à abandonner les lieux pour reposer la machine.


DIMANCHE 21 JUILLET

Enjoué et frais, les Concrete Knives sont visiblement heureux de jouer à Dour leurs morceaux aux accents tubesques immédiats, c'est efficace et sympathique. Nous noterons juste que le groupe n'est pas encore bien habitué à la configuration "festival" car le coup du rappel ne fonctionne pas. Ici, on joue tout son créneau d'un seul jet, se faire bisser n'est pas dans les coutumes. Résultat : une baisse de tension avant un final qui aurait pu être bien plus bondissant. Eux, en revanche, connaissent bien les festivals, les Raggasonic font remonter les souvenirs de jeunesse dès lors que leurs tubes résonnent sur la grande scène. C'est avec un peu de recul (près de 18 ans quand même) que nous nous laissons envouter (mettons ça sur le compte de la fatigue) par les flows de Big Red et Daddy Mory. Pas sûr d'écouter ça de nos jours mais ce show a le mérite de nous faire passer un moment agréable en attendant le concert de Burning Time. Comment ce dernier, qui sort un premier EP deux mois avant le festival, peut être programmé ? Il lui suffit de réunir deux monstres de la scène métal belge : Danny (chanteur de Deviate) et Xavier (guitariste de Channel Zero accompagnés de Stef (batteur de Master of Waha et Sons of Jonathas) et c'est parti ! Sur scène, ce n'est ni métal, ni hardcore, c'est du stoner assez gras qui se cherche encore. Mwouais, nous sommes plutôt mitigés surtout lorsque toute l'année, nous chroniquons un paquet de groupes dans le même genre qui sont bien plus intéressants. Leur patronyme est aussi long que leurs phrasés cycliques de guitare. Le math-rock instrumental des belfastois d'And So I Watch You From Afar divise au sein de la team. C'est propre, costaud, énergique mais les compositions peuvent titiller par leurs constructions, il est vrai, parfois monotone. Passés les premiers titres de Kadavar où l'impression d'écouter un énième rip-off de Black Sabbath se fait tenace, nous nous laissons finalement prendre au jeu par la qualité des embardées heavy. Un live pas désagréable, tout comme celui de Thee Oh Sees. C'était le groupe à ne pas manquer ce dimanche, les Californiens nous offrant notre dose de garage rock psyché de haut-standing. Les guitares abrasives, le riffing et les soli rock n' roll ainsi que les rythmiques majoritairement endiablées font parti du programme sur lequel les gaillards se sont bâtis leur forte réputation. Ils n'ont donc rien volé à Dour malgré le fait que nous ayons raté un bout faute de timing.

Funeral For A Friend (Dour 2013) Funeral For A Friend (Dour 2013) Depuis la réception il y a une dizaine d'années de Between order and model, Funeral For A Friend a accompagné le W-Fenec avec pas mal de changements de line-up et une période de creux, nous avons retrouvé des Gallois fringants avec Welcome home armageddon puis Conduit, leur venue à Dour faisait donc saliver... Cependant, leur prestation restera comme un des plus mauvais souvenirs de cette édition, Matthew n'assurant que très modérément les parties aériennes et mélodiques. Pas vraiment dedans, le chanteur a tout fait pour se rattraper sur les parties plus agressives mais FFAF sans ses mélodies tranchantes, ça ne fonctionne pas. IAM restera comme le concert de La Last Arena qui aura rencontré le plus d'affluence. Reste que la prestation des Marseillais en live est assez plate et sans véritable valeur ajoutée, même saupoudré de quelques titres du mythique (mais totalement inégal...) L'école du micro d'argent. Et pour couronner le tout, ils ont joué "Je danse le mia", succès commercial certes, mais un titre passablement honteux de leur discographie. Leurs concitoyens de Dagoba amènent du lourd sur scène en balançant des riffs puissants. Mais ils peuvent avoir tout le poids qu'ils veulent, ils leur manquent quelque chose qui ne pèse rien : une âme. Le rock cradingue des Two Gallants a tous les atouts pour nous charmer sur disque. En live, malgré l'énergie développée, nous sommes très loin de l'"eargasm". C'était la grosse tête d'affiche de ce festival, les Smashing Pumpkins, ou plutôt Billy Corgan (seul rescapé de la grande époque) et sa bande de mercenaires, ont répondu présent. Et comment ? En livrant un show séduisant en forme de semi-best-of : "Zero", "Today", "Disam", "Bullet with butterfly wings", "Ava adore"... Quelques nouveaux morceaux viennent parfois atténuer un live qui sent notre adolescence à plein nez. Seul bémol, la reprise d'"Immigrant song" de Led Zeppelin dotée d'arrangements vocaux inappropriés. Et visuellement, le dispositif de Sean Evans (le mec qui a bossé sur la tournée The wall de Roger Waters) était vraiment classe. Sinon, cette grosse tête de con de Billy a été fidèle à lui même, un poil expéditif et avare en contact avec le public.

C'est en plein feu d'artifice de la fête nationale belge que les deux petits bouts de choux de Carbon Airways (deux frères et sœurs bisontins de 16-17 ans) saisissent d'une main de fer la scène de la Jupiler X Marquee qui, disons-le, n'est pas vraiment remplie du fait du départ massif et progressif des festivaliers. Au menu, de l'électro-clash bien fignolé et des basses à t'en faire péter le cerveau. A revoir et à apprécier sur une scène plus petite pour valider l'impact réel de cette machine qui fait grand bruit, et dans la presse, et dans nos oreilles. C'est par pure regret de louper une légende de l'abstract hip-hop, le dénommé DJ Shadow, que nous nous sommes rendus aux abords de la Dance Hall (la tente étant très peuplée) avant de quitter les lieux. Le producteur californien sait prendre tout le monde à contre-pied tant le son envoyé semble complexe et subtile à ce moment de la journée (la nuit en fait). L'impression reçue à une centaine de mètres ressemble plus à de l'IDM / trip-hop mélodieux que du hip-hop groovy. C'est bon sans pour autant être exceptionnel. Peut-être aurait-il mieux fallu le programmer plus tôt et sur la grande scène pour apprécier davantage le contenu de ce show (à la place d'IAM par exemple) ?